Politique
Cette déclaration était tombée d’autant mal qu’à la même époque, le président rwandais Paul Kagame avait lancé l’idée d’une Conférence de Berlin II qui devrait être consacrée à la redéfinition des frontières héritées de la colonisation. Lors d’une visite officielle à Kinshasa, l’ancien locataire de l’Elysée recadrait les choses en précisant que dans son esprit, il n’était pas question d’exproprier les Congolais mais plutôt d’encourager les Etats des Grands Lacs à exploiter en commun leurs ressources naturelles, dans l’optique de leur intégration économique.
Curieusement, au sortir de la guerre de l’Est du Congo, le même discours commence à se faire entendre, à travers la voix de l’envoyé spécial des Etats-Unis d’Amérique dans les Grands Lacs, Russ Feingold. Dans une interview qu’il a accordée à Radio France Internationale, en marge du Sommet sur la Paix et la Sécurité de l’Elysée, organisé du 6 au 7 décembre 2013 à Paris, a pratiquement exhumé le « Plan Sarkozy ».
En effet, parlant de son projet de tenue d’un dialogue entre Etats de l’Afrique Centrale, des Grands Lacs et de l’Afrique, en vue de discuter des causes profondes des crises politiques et militaires récurrentes, il a laissé entendre que son ordre du jour pourrait comporter les questions des groupes armés, des frontières et « des opportunités économiques qui pourraient naître non seulement pour l’Est du Congo mais aussi pour toute la région des Grands Lacs ».
Que dire de tels propos sinon qu’ils traduisent ce que certains décideurs de notre Planète pensent réellement du Congo, à savoir qu’il serait trop grand et potentiellement trop riche pour être géré par les Congolais seuls. D’où, il leur faut accepter la révision du tracé des frontières héritées de la colonisation et le concours des voisins pour la mise en valeur de leurs potentialités naturelles.
Le Congo, un problème pour le Rwanda, l’Ouganda et le Burundi ?
Le Congo serait-il, comme le soutenait le maître de Kigali, réellement un problème pour le Rwanda, l’Ouganda et le Burundi ? On n’est pas loin de le croire. Car, interrogé au sujet de la nécessité des dialogues internes entre Etats des Grands Lacs et leurs groupes armés, Russ Feingold a développé une curieuse rhétorique : « Je ne pense pas que la solution soit que chaque gouvernement commence à négocier avec un groupe armé particulier. Si un dialogue doit s’ouvrir, il faut que ce soit entre les pays de la sous-région. Les groupes armés n’ont pas leur place à cette table. Les pays, oui… ».
Pourtant, le gouvernement congolais a été contraint de négocier avec les rebelles du M23. Ceux-ci avaient eu le privilège d’être reçus par Yoweri Museveni, président en exercice de la CIRGL (Conférence internationale sur la région des Grands Lacs). Et, présentement, la communauté internationale multiplie les pressions sur Kinshasa pour l’amener à conclure un accord avec cette « force négative ». Pourquoi les rebelles de l’ADF/Nalu et la LRA n’auraient-ils pas droit à des pourparlers avec le régime de Yoweri Museveni ? Pourquoi Paul Kagame ne négocierait-il pas un Accord de paix avec les FDLR (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda) ?
Bref, Russ Feingold ainsi que les envoyés spéciaux de l’ONU, de l’Union européenne et de l’Union africaine dans les Grands Lacs soutiennent à la fois une chose et son contraire, à savoir un Accord politique entre le gouvernement congolais et sa rébellion d’une part et, d’autre part, le refus d’un dialogue particulier entre Museveni, Kagame ou Nkurunziza et ses rebelles.
Congolais : attention !
A voir comment la communauté internationale s’agite autour du sort du M23, qu’elle refuse de voir disparaître alors que l’Accord-cadre d’Addis-Abeba et la Résolution 2098 du Conseil de sécurité exigeaient le démantèlement de cette force négative, les Congolais devraient faire très attention à la suite des événements. Ceux qui président aux destinées du pays devraient même souscrire à la stratégie de l’anticipation, de manière à prévenir des surprises désagréables.
Après la victoire militaire sur le M23, l’heure devrait être à la réflexion au sujet des réponses à apporter à tous ceux qui, au niveau de la communauté internationale, ne cessent de creuser l’idée de la revisitation du tracé des frontières et de la co-gestion des ressources naturelles dans la région des Grands Lacs. Car, en réalité, lorsque l’on examine, sous toutes les coutures, les thématiques des frontières et des richesses, l’on se rend compte que c’est le grand Congo qui est présenté comme un problème pour certains de ses voisins, dont les velléités de spoliation d’une partie de son territoire ne trompent plus.
Le challenge à gagner au plus tôt par les autorités congolaises, c’est celui de la refondation d’une armée forte, capable de faire face aux tenants du discours du charcutage du tracé des frontières nationales et des ressources naturelles. Sans cela, les ennemis de la paix et du progrès du Congo ne vont pas tarder à susciter d’autres M23.
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