Politique
Retour au parti-État. La démocratie pluraliste est en berne à l’hémicycle. L’opposition, en large infériorité numérique, est plus qu’étouffée. Moins de 30 élus pour une famille politique qui devait se poser pourtant en contrepoids du pouvoir. Aucun équilibre n’est envisagé même pour des justes causes. Ainsi, en avait voulu le chef de la Ceni, Denis Kadima qui a mené l’opération “effacer l’opposition”.
À l’époque de Kabila, l’opposition parlementaire sortait quand-même la tête de l’eau et se faisait parfois entendre. À l’hémicycle, il existait même un semblant de débat. Aucune question n’était tranchée sur les matières sensibles. Des consensus étaient négociés. Aujourd’hui, la Chambre basse, à 95 % Union sacrée, reflète l’image d’un pays à pensée unique. La réalité peut bien ou pas être celle-là mais vu de l’extérieur, l’image de l’Assemblée nationale pâtit. Pas étonnant qu’avec les ultras, la parole soit confisquée à une minorité qui aura du mal à exister pendant les débats essentiels d’une nation déchirée par la guerre. Des voix se lèvent déjà pour décrier le rôle néfaste joué par Kadima pour bannir l’opposition de deux Chambres du Parlement. Nombreux candidats de l’opposition ont été sciemment gommés par une commission électorale aux ordres qui a fait, de l’avis de plusieurs observateurs, reculer le pays de dix ans en arrière en matière de démocratie. Il est inconcevable que même dans les fiefs réputés de l’opposition que des candidats UN fassent carton plein. Cela dénote, avait indiqué le Nobel Mukwege, d’un stratagème bien étudié pour dégonfler l’opposition. Malheureusement, les zélés à la base de cette machination ont oublié que la contradiction au Parlement peut sauver le pays de la dérive. Sinon, les deux Chambres ne seront que de caisses de résonance d’un pouvoir qui veut pousser aux réformes interdites.
L’opposition davantage amoindrie
Depuis une semaine, les rumeurs enflent sur la volonté du pouvoir de tuer carrément l’opposition à l’Assemblée nationale. Si publiquement, le président Félix Tshisekedi a promis, lors du dernier briefing spécial aux côtés du ministre des Médias, Patrick Muyaya, de soutenir l’opposition pour qu’elle se désigne un porte-parole et joue son rôle de contradicteur du pouvoir mais il est tout de même curieux de constater que dans les faits, il n’en est pas le cas.
Quelques décideurs tapis dans l’ombre ont levé l’option de ponctionner encore dans le quota de deux groupes politiques phares de l’opposition parlementaire à savoir Ensemble et Avançons. Des pressions seraient exercées sur les juges de la haute Cour, dans le cadre des contentieux électoraux, pour ravir des sièges au peu d’élus de l’opposition déjà proclamés par la Ceni. Dans leur logique, il faut transformer le temple de la démocratie en une cour d’applaudisseurs. Pour le sociologue Songolo Elvis, le danger de l’instauration de la pensée unique est si grand que la République pourrait s’engouffrer dans la mafia. En ce moment-là, le contrôle parlementaire sera complaisant, à la limite inexistant. « Avec une telle logique, on aura vraiment pas aidé le pays à se relever », a déploré le politologue Kashala Vincent.
L’Udps interpellée
Parti symbole de 30 ans de lutte pour l’instauration de la démocratie au pays dont le “mot” revient d’ailleurs dans sa dénomination, l’Udps ferait mieux de s’interdire de cautionner une telle forfaiture. Le régime Tshisekedi n’a aucun intérêt à avoir en face une opposition décharnée et aphone. Si la contradiction est fondamentale en démocratie, l’idée de réduire l’opposition à sa plus simple expression serait suicidaire. Sinon, comment ne pas penser à ceux qui prédisent le schéma de la révision des articles intangibles de la Constitution. Des interdits qui peuvent mettre l’eau au moulin aux forces du mal qui peinent à justifier leur action déstabilisatrice. La confiscation de tous les droits à un peuple par un camp politique a été toujours le déclencheur d’une situation inattendue. C’est le pire scénario qu’il faut à tout prix éviter. Un ancien parlementaire rappelle que la sagesse conseillerait en ce moment difficile que traverse le pays d’afficher une attitude de rassembleur, d’unité pour sauver le Congo au centre d’un grand complot international. Le contraire favorisera le déchirement car la frustration politique conduit parfois à des réactions extrémistes. De toutes les façons, prévient un élu Ensemble, la rue va prendre le relais à défaut de se faire écouter à l’hémicycle. Le plan du pouvoir de faire passer les réformes allant dans le sens de consolider la dictature se butera à la résistance populaire. Les mêmes méthodes appliquées par feu Étienne Tshisekedi pour débouter les régimes dictatoriaux de Mobutu et des Kabila, seront dirigées malheureusement aujourd’hui contre son fils bien affalé dans son fauteuil du pouvoir.
La population appelée à dire non
« Réinstaurer la pensée unique, il n’en est pas et ne sera jamais question dans notre pays. Je dis non et non », hurle Longela Maurice de la Lucha. La société civile n’aura pas de choix que de contrer un tel schéma, ajoute-t-il. Déjà que les mouvements pro-démocratie sont en première ligne pour gronder un pouvoir qui emprisonne les opposants et les journalistes. N’oublions pas que la terreur ne peut contraindre la population au silence pour toujours. Ceux qui croient avoir les mains libres pour tout tenter, seront surpris de voir le même peuple les titiller. Des exemples sont légion.
De Mobutu aux Kabila, aucun chef n’a réussi à mater la population quand il a fait prévaloir ses droits. À chaque fois, les pouvoirs ont reculé face à l’orage. “Il est inutile donc de piétiner le peuple après un nouveau hold-up électoral”, s’est insurgé Mangu, un brillant activiste de la société civile. Pour lui, les droits les plus légitimes de la population doivent être sauvegardés à travers de mécanismes démocratiques et institutionnels. Sinon, le vent de la liberté va emporter l’oppresseur et personne ne saura résister quand la roue de l’histoire tourne. On en a déjà vu chez nous et ailleurs.
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