Politique
Dans l’incertitude d’organiser des élections apaisées, l’Opposition et la Majorité présidentielle se réfugient tous derrière l’article 64 de la Constitution. Chacun y va de son côté. Mais, c’est au peuple que reviendra sûrement le dernier mot pour faire triompher l’alinéa qui garantit au mieux ses intérêts.
En attendant les conclusions du conclave du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement ce samedi au siège de l’UDPS, le climat politique reste toujours dominé par l’incertitude de la tenue des élections fin décembre 2017. Si l’Opposition accuse la Ceni (Commission électorale nationale indépendante) de jouer le jeu du pouvoir, la Majorité présidentielle se dit non concernée par la position affichée par la Ceni, se refusant, selon ses principaux ténors, de brader l’indépendance de la Centrale électorale.
Réagissant à ce propos sur le site d’actualite.cd, Lambert Mende, porte-parole du gouvernement et membre du bureau politique de la MP, a presque botté en touche. « C’est la Ceni qui a annoncé le report des élections. Alors la Ceni n’est pas le pouvoir. Elle est composée de la Majorité, de l’Opposition et de la Société civile. De la même façon que le parlement est composé. Alors, arrêtez de casser le sucre sur le dos de ce que vous appelez le pouvoir, profitant de n’importe quel événement pour salir ceux qui gouvernent le pays. Donc attendez que les trois organes se réunissent pour qu’ils reçoivent le rapport de la Ceni qui est seule habile à organiser les élections, parce qu’apparemment tout le monde veut se faire expert à l’organisation des élections. Donc la Ceni n’est pas le pouvoir », avait indiqué le porte-parole du gouvernement.
Dans tous les cas, l’Opposition – la vraie – qu’incarne le Rassemblement, a promis de résister pour faire prévaloir l’accord politique du 31 décembre 2016 qui prévoit la tenue des élections fin 2017.
Pour l’instant, la certitude d’avoir les élections dans les échéances prévues dans cet accord sont minimes. Le président de la Ceni, Corneille Nangaa, a été le premier à se lancer dans l’arène, annonçant dernièrement depuis Paris, la capitale française, « l’impossibilité » pour son institution de s’en tenir au deadline fixé dans l’accord négocié sous l’égide de la Cenco (Conférence épiscopale nationale du Congo).
Dans les différents états-majors politiques, les déclarations de Nangaa ont suscité un tollé général. Le Rassemblement a juré de tout mettre en œuvre pour ramener la Ceni à la raison. Il pense notamment s’appuyer sur l’article 64 de la Constitution, invitant par la même occasion le peuple à se « prendre en charge » pour reconquérir sa démocratie.
Curieusement, la MP a promis également de se référer au même article 64 pour protéger, se dit-on, les institutions de la République.
Tous s’acharnent sur l’article 64, chacun cherchant à tirer la couverture de son côté.
Que retenir de l’article 64 ?
En effet, dans la Constitution du 18 février 2006, l’article 64 est libellé comme suit : « Tout Congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution. Toute tentative de renversement du régime constitutionnel constitue une infraction imprescriptible contre la nation et l’Etat. Elle est punie conformément à la loi ».
À la lecture de cet article, l’on comprend aisément que l’Opposition et la MP font, chacun en ce qui le concerne, une interprétation sélective de cette disposition constitutionnelle.
En s’appuyant sur l’article 64 pour légitimer son combat, l’Opposition ne se sert en fait que du premier alinéa de l’article 64 qui invite notamment le peuple à résister contre « tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution ».
Par ce temps de glissement du cycle électoral, l’actuelle mandature ayant constitutionnellement pris fin depuis le 19 décembre 2016, l’Opposition considère – à juste titre d’ailleurs – que le pouvoir en place à Kinshasa n’est exercé sur aucune base légitime. L’Accord du 18 octobre 2016 de la Cité de l’UA, suivi de celui signé le 31 décembre 2016, ont tenté de colmater cette brèche. Malheureusement, l’accord du 31 décembre 2016, plus conciliant et inclusif, a fait flop au moment de son application, laissant ses acteurs majeurs, notamment ceux du Rassemblement, sur le trottoir. Ce qui a fini par raviver les tensions politiques.
À cet effet, le Rassemblement estime qu’il est de son devoir d’appeler le peuple à faire usage de l’article 64 pour mettre fin à l’imposture.
Du côté de la MP, l’interprétation de l’article 64 est diamétralement opposée à celle qu’en fait l’Opposition. Et comme toujours, c’est Lambert Mende qui s’est chargé de porter la voix de la majorité au pouvoir. Interrogé à ce sujet sur actualite.cd, le porte-parole du gouvernement s’est montré plutôt menaçant. « Il ne faut pas saucissonner l’article 64. Nous soutenons l’article 64. S’ils [Ndlr : les leaders de l’Opposition] invoquent l’alinéa 1, nous allons invoquer l’alinéa 2 qui interdit de faire n’importe quoi dans le pays. On ne doit pas faire un coup d’État quand il y a un problème dans le pays. Vous devez résoudre les problèmes selon le mécanisme prévu par la Constitution. Donc arrêtez de saucissonner la Constitution », avait déclaré sans détours le porte-parole du gouvernement.
À quoi peut-on s’attendre ?
Il y a sûrement une confrontation en l’air. Evidemment, pour l’instant, elle ne se limite que sur un terrain essentiellement juridique. Il faut cependant craindre qu’elle se transpose dans la rue.
Dans l’incertitude d’organiser les élections suivant les termes convenus dans l’accord du 31 décembre 2016, la prochaine bataille se jouera autour de l’article 64 de la Constitution. Entre l’Opposition et la Majorité, chacun en fait sa lecture – au gré de ses intérêts.
Il y aura certainement un arbitre pour les départager en dernière. C’est le peuple, seul détenteur du vrai pouvoir. Sans doute, au moment opportun, le peuple se lèvera pour imposer la primauté d’un des alinéas de l’article 64 qui protège au mieux ses intérêts. Qui vivra verra !
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