Provinces
Dans sa nouvelle enquête, le journaliste Maurin Picard s’intéresse à un épisode oublié de l’histoire de la Françafrique : le soutien apporté par le régime gaulliste à la sécession katangaise, dans l’ex-Congo belge, en 1961. Il dévoile comment la France a appuyé cette rébellion dans le but d’étendre son « pré carré », et pourquoi cette ingérence s’est soldée par un échec.
Voilà plusieurs années que le journaliste Maurin Picard traque les zones d’ombre de l’histoire de l’ex-Congo belge, notamment de la période trouble de sa décolonisation. Après avoir publié en 2019 une enquête sur la mort toujours inexpliquée de « Monsieur H », le secrétaire général des Nations unies Dag Hammarskjöld, dans le crash de son avion en Rhodésie du Nord (Ils ont tué Monsieur H. Congo, 1961. Le complot des mercenaires français contre l’ONU, Seuil), il propose chez Perrin une nouvelle plongée dans l’histoire, cette fois, de l’aventure sécessionniste du Katanga : Katanga ! La guerre oubliée de la Françafrique contre l’ONU. Une affaire « nimbée de brume et de mystères », écrit-il d’emblée, peu connue en France, et très peu étudiée, alors qu’elle s’inscrit pleinement dans l’interminable histoire de la Françafrique.
Qui sait que la France de Charles de Gaulle a tenté de profiter de la sécession menée par Moïse Tshombé au Katanga, en 1960, pour bouter l’ancien « maître », la Belgique, hors de cette zone convoitée pour ses richesses naturelles ? Qui connaît les noms de ces quelques militaires en mission commandée, des anciens de l’Organisation de l’armée secrète (OAS) pour la plupart, qui ont été recrutés sur place pour servir le régime rebelle, avec l’assentiment discret de Paris : Roger Trinquier, Roger Faulques, etc. ? Cet épisode oublié de la guerre froide, qui n’a dû sa notoriété qu’à la mort brutale de Dag Hammarskjöld, a eu pourtant une incidence majeure dans la marche du Congo tout juste libéré du joug colonial.
UN PUZZLE INCOMPLET
Rappel des faits : le 30 juin 1960, le Congo belge devient indépendant. Joseph Kasa-Vubu en est le président, Patrice Lumumba le Premier ministre. Moins de deux semaines plus tard, le 11 juillet, Moïse Tshombé proclame l’indépendance de l’État du Katanga avec l’aide de quelques colons belges. Les autorités sécessionnistes créent leur monnaie et leur police, et recrutent des mercenaires blancs pour encadrer leur modeste armée. C’est la guerre froide, le Katanga joue à fond la carte de l’anticommunisme et séduit des défenseurs de l’Empire.
Très vite, l’ONU déploie ses Casques bleus et envisage une intervention militaire. C’est à ce moment que la France intervient. « Une poignée d’ex-officiers débarqués d’Algérie, quadras aguerris lors de la Seconde Guerre mondiale et en Indochine, répondant à d’obscures instructions », indique Maurin Picard. Ce ne sont pas des « affreux » ou des « chiens de guerre », affirme-t-il. « Experts de la guerre irrégulière, ils étaient en mission commandée, à quelques exceptions près, et appliquaient la politique d’aide clandestine apportée par la France au Katanga séparatiste. » Ils étaient en lien aussi avec les régimes racistes d’Afrique australe, l’Afrique du Sud et la Rhodésie du Nord. Mais l’aventure vire à la catastrophe. Tandis que l’ONU veille et fait enrager les gaullistes, Paris ne peut pas assumer, et ses hommes sur place se trouvent pris en étau.
Avec une grande minutie, le journaliste, qui a épluché des milliers de pages d’archives (en France, en Belgique et aux Etats-Unis) pendant six ans, fait pénétrer le lecteur dans le secret de cette énième déstabilisation française en terre africaine – il y en eut beaucoup avant, il y en aura beaucoup après. Il démontre comment les gaullistes ont sauté sur l’opportunité pour tenter d’étendre leur « pré carré », en secret, et comment ils ont utilisé des partisans de l’Algérie française en les envoyant à l’autre bout du continent, à Lubumbashi.
L’auteur l’admet, il manque encore de nombreuses pièces au puzzle katangais : « L’essentiel du drame s’est joué en coulisses, souvent sans la moindre trace écrite. Les protagonistes ont délivré leurs instructions par téléphone, celles annotées noir sur blanc ont fait l’objet d’une destruction quasi systématique. » Mais avec ce livre, il dévoile un pan de l’histoire de France qui était jusqu’alors inconnu.
Le code à 7 caractères (précédé de « @ ») à côté du Nom est le Code MediaCongo de l’utilisateur. Par exemple « Jeanne243 @AB25CDF ». Ce code est unique à chaque utilisateur. Il permet de différencier les utilisateurs.
Les plus commentés
Politique Leadership de gouvernance : Selon le professeur Godé Mpoy, Félix Tshisekedi est le meilleur président de l’histoire de la RDC depuis l’indépendance
08.07.2024, 17 commentairesAfrique Insécurité dans l'Est de la RDC : l'ONU approuve le soutien de l'Ouganda aux terroristes du M23/RDF
08.07.2024, 11 commentairesPolitique Les USA s’opposent au « soutien complet » de l’ONU à la SAMIDRC
09.07.2024, 10 commentairesSociété Koffi Olomide fait des victimes à la RTNC : Jessy Kabasele suspendu
10.07.2024, 9 commentaires
Ils nous font confiance
Moïse Tshombe