Style et Beauté
CRÉATION. Les cinq créateurs lauréats du concours Africa Fashion Up ont présenté leurs collections dans les jardins du musée du Quai Branly-Jacques Chirac.
Pour sa troisième édition, le défilé des créateurs de mode des lauréats du concours Africa Fashion Up s'est déroulé le 7 juillet et pour la première fois dans les jardins du musée du Quai Branly-Jacques Chirac, à Paris. En défilant dans ce lieu emblématique, les créateurs de mode africains tissent des liens entre les arts anciens, les cultures tout en célébrant leur diversité. Cet événement est venu en quelque sorte clore la Fashion Week parisienne, qui s'est déroulée du 3 au 6 juillet, et surtout montrer que le continent africain regorge de talents.
Pour les cinq lauréats – Aristide Loua (Ivoirien) Yonael Marga, (Éthiopien), Ibrahim Taju (Nigérian), Shamyra Moodley (Sud-Africaine), Sjafaru Larry (Ghanéen)* –, ce défilé devant plus de 500 personnes était le point d'orgue d'une semaine d'immersion dans les coulisses de la mode parisienne.
Une immersion dans les coulisses des métiers de la mode
Les lauréats ont été sélectionnés sur la base de leur créativité, de leur parcours, de leurs inspirations et de la dimension durable et sociale de leur marque. « Le concours a été lancé en ligne en février. Cette année, nous avons eu 159 candidatures du monde entier, des États-Unis, de Dubai et sur bien sûr de tout le continent africain. Des young leaders fashion que nous avons formés, des photographes, des journalistes, des gens de la mode vont sur place vérifier le travail des créateurs pour nous confirmer notre pré-sélection. Cette pré-sélection est présentée aux membres du jury qui déterminent alors une sélection finale », détaille Valérie Ka, ancien mannequin franco-ivoirienne fondatrice de sa propre marque de prêt-à-porter. Elle a lancé Africa Fashion Up pour justement mettre la créativité africaine sur les podiums de la mode internationale.
« Le défilé Africa Fashion Up est une étape-clé de l'aventure parisienne des lauréats. Il vient après une semaine d'accompagnement précieux destiné à leur ouvrir de nouvelles portes vers le succès », commente Valérie Ka. Lors de cette semaine parisienne, les cinq designers africains ont bénéficié de formation et de coaching et ont pu participer à des master classes dispensées par Balenciaga, visiter de grandes maisons et des ateliers de couture et notamment le 19 M, le nouveau centre culturel dédié aux métiers d'art de Chanel, à Aubervilliers, ainsi que le grand magasin les Galeries Lafayette Haussmann.
Dans les mois à venir, ils pourront suivre des enseignements en management dispensés par HEC Paris et bénéficieront d'un accompagnement personnalisé de la part de Balenciaga dans le cadre d'un programme de mentorat prolongé.
« Déjà, la présentation devant un large public à Paris, avec des investisseurs, la presse, c'est très important. Nous sommes enchantés de présenter notre travail, et aussi d'avoir cette opportunité de rencontrer des personnes du monde de la mode, comme Kering, Guerlain et d'apprendre. Je suis autodidacte et avide d'apprentissage, de découvertes et de rencontre, cet événement nous offre cette opportunité-là », confie Aristide Loua.
Un véritable show
Après l'effervescence des préparatifs, maquillage, coiffure, essayages et ajustement de dernières minutes sur les mannequins, place au show. Les filles et les garçons défilent, serpentent dans les allées. Chacun des lauréats apporte son originalité, sa créativité et son savoir-faire. Aux couleurs chatoyantes et vibrantes de Shamyra Moodley, répondent les pièces épurées ornées de broderies traditionnelles de Yonael Marga. Aux vêtements sobres et ultra-structurés d'Ibrahim Taju, répondent les ensembles et accessoires colorés style années 1970 de Sjafaru Larry et les tailleurs aux couleurs pimpantes et surprenantes d'Artiste Loua. Deux autres créateurs, anciens lauréats du concours en 2021, le Malgache Eric Raisina et l'Ivoirien Guy Fabrice ont également participé.
Le défilé, c'est aussi un show, avec en artistes invités le danseur Yann Antonio et les rappeurs Passi et Orti, ainsi qu'un superbe décor et une scénographie signée par l'artiste Junior Fritz Jacquet, sculpteur de papier.
À l'issue du défilé le jury, composé de professionnels issus des prestigieuses enseignes de la mode, désigne le gagnant.
Et le gagnant est…
Aristide Loua, originaire de Côte d'Ivoire, a lancé sa marque Kente Gentlmen, en avril 2017. « J'ai un parcours atypique, reconnaît-il. Autodidacte dans la mode, j'ai fait des études de mathématiques, à New York. J'ai quitté la Côte d'Ivoire, lorsque j'avais 15 ans, j'ai fait trois ans en Inde et 10 ans aux États-Unis. Pendant toute cette période, je ne suis pas rentré au bercail ! Le déclic est venu en 2013, quand ma mère m'a envoyé des chemises qu'elle avait fait coudre à Abidjan. Le fait de les porter, cela m'a donné l'envie de redécouvrir mon identité, mes origines, à travers la mode. Quand je suis rentré en Côte d'Ivoire en 2015, j'ai pu rencontrer des artisans, des tailleurs pour la confection des vêtements et réunir une équipe pour créer la marque. En 2017, j'ai réalisé une première collection capsule. »
Ses inspirations, il les puise à travers des personnalités, actrices, chanteurs, mais aussi des époques ou encore des poèmes. « Les pièces présentées aujourd'hui sont inspirées de l'actrice, Robin Givens dans le film Boomerang de 1992. Elle dégage beaucoup de charisme dans un milieu d'hommes, avec un tailleur bien coupé, des couleurs atypiques que l'on ne retrouve pas souvent dans le milieu des affaires. Pour la collection précédente, je me suis inspiré de la période des indépendances en Afrique, des droits civiques aux États-Unis. Dans tout ce chaos politique, il y avait toujours cet engouement artistique de la population noire dans la création du jazz, du R'n'B, Miles Davis, Fela Kuti, Marvin Gaye, Nina Simone. Chaque pièce avait le prénom d'une légende par exemple Nina, Miles, etc. »
Le gagnant bénéficiera d'un beau coup de pouce pour sa diffusion commerciale. Pendant un an, il sera présent dans les zones de duty free gérées par Lagardère Retail. « Quand cet événement nous a été présenté, je ne pouvais que le soutenir. Dans nos activités de tous les jours, nous faisons en sorte de soutenir les initiatives locales africaines sur nos zones en leur permettant d'accéder à un marché qui est souvent exclusivement international », se réjouit Sountou Bousso, CIO de Lagardère travel retail en Afrique de l'Ouest. « C'est une manière de soutenir les initiatives de l'industrie de la mode, de la création que de leur permettre et de leur ouvrir ce marché qui leur est aujourd'hui inaccessible. Cette ouverture de marché nous le faisons aujourd'hui à zéro coût pour eux. Nous leur offrons une présence sur tous les spots aéroports que nous gérons en Afrique ce qui leur donnera accès à quelques millions de passagers », poursuit-il.
Vous avez dit mode africaine ?
En coulisse, en interrogeant Valérie Ka sur le choix du vainqueur et les critères du jury, elle explique que par exemple, pour le designer Ibrahim Taju, dont les pièces présentées sont exceptionnelles, « les membres du jury, la plupart sont européens, ont trouvé que ce n'était pas assez africain. Ils ont voulu mettre en avant les tissus que font les femmes ivoiriennes ».
De son côté, Aristide Loua observe qu'il est « très difficile de définir la mode africaine. Lorsque vous regardez, ici tous les univers sont présents, avec par exemple Ibrahim Taju, très inspiré par la culture yoruba, mais aussi la culture nipponne par les mangas par exemple, ou Sjafaru Larry inspiré par le nord du Ghana. C'est une mode plurielle qui a plusieurs couleurs, beaucoup de ressources dans les matières avec le kente, le bogolan, le faso dan fani ou le tie-dye », détaille-t-il, avant de poursuivre, « moi, si je dois définir ma marque, qui est une marque africaine, c'est trois principes : la couleur, la culture, et la poésie dans le message qui est véhiculé dans chaque pièce, dans le sentiment que ressent la personne en portant une pièce. L'Afrique est un continent très coloré, je n'ai pas peur de la couleur. Mais je veux que cela soit très structuré, je ne veux pas que cela tombe dans le stéréotype. La culture aussi, car je travaille avec des artisans locaux. Avec eux, j'innove dans la confection du textile, je crée des tissus. C'est important pour moi de travailler en étroite collaboration avec les artisans, de discuter avec eux pour savoir s'il est possible de concevoir un tissu, une couleur. Cela me permet de réaliser des pièces uniques. »
*Les 5 lauréats de l'Africa Fashion Up sont : Aristide Loua, créateur ivoirien, pour Kente Gentlemen ; Yonael Marga, créateur éthiopien, pour Yonael Marga ; Ibrahim Taju, créateur nigérian, pour TJWHO ; Shamyra Moodley, créatrice sud-africaine, pour Laaniraani ; Sjafaru Larry, créateur ghanéen, pour Larry Jay
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