Regard croisé sur le M23 : du CNDP à nos jours

Le mouvement politico-militaire M23 qui exige son intégration dans l'armée congolaise, conformément au communiqué de Nairobi signé sous le régime Kabila, est un résidu du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), composé des ex-rebelles pro Kigali basés à Kitchanga, dans le territoire de Masisi, au Nord-Kivu.

Après l'arrestation de leur leader militaire Laurent Nkunda lors de l'opération Umoja Wetu lancée conjointement par les Fardc avec l'armée rwandaise sous la direction du général John Numbi Tambo Banza, ces anciens rebelles du Cndp se sont reconstitués en Mouvement du 23 mars pour exiger l'application du communiqué de Nairobi qui a été signé le 23 mars dans la capitale Kényane. De là, ils quitteront Masisi pour s'installer à Rutshuru, plus précisément dans les collines de Runyonyi, Tchanzu, le long des frontières entre le Rwanda et la RDC, pour être ravitaillés par Kigali. C'est de là qu'il lancera l'attaque contre les positions des Fardc et récupéreront Jomba, village d'origine de Laurent Nkunda où il avait accueilli Olunsengun Obasanjo, ancien président du Nigeria, nommé émissaire de l'ONU pour le retour de la paix en RDC. Fort de l'appui militaire de Kigali, le M23 prendra Bunagana et quelques localités stratégiques de Rutshuru, jusqu'à occuper Goma aux yeux et à la barbe des casques bleus de la Monusco.

Rupture

Le mouvement rebelle a subi une secousse après la fuite de Bosco Ntaganda. Il se scinda en deux factions, une dirigée par Bertrand Bisimwa et l'autre par le pasteur Runiga. Mais ce dernier n'avait pas l'appui militaire de Kigali, ni d’hommes sur terrain.

Le commandant militaire conduit par le colonel Sulutani Makenga et Vianney Kazarama était resté fidèle à Bernard Bisimwa. Mais également la direction politique du M23 avec Kambasu Ngeve, Nandé de Béni et ancien gouverneur de Beni-Butembo sous l'administration du RCD-KML de Mbusa Nyamwisi, Me René Abandi, avocat au barreau de Milan, Bonimpa, plusieurs fois administrateur de Rutshuru… sont restés attachés à Bertrand Bisimwa.

D'après une source proche du dossier, le M23 n’existe que de nom

Car, les anciens rebelles du CNDP qui ont créé le M23 se sont lancés dans les affaires après avoir gagné beaucoup d'argent lors des négociations de Nairobi sous Joseph Kabila. D’autres, à l’instar du Major Willy Ngoma, prétendu porte-parole du M23, sont de nouvelles recrues. Ils montent les enchères croyant que le régime Tshisekedi cédera à leurs caprices comme ce fut le cas avec le régime passé.

Le colonel Vianney Kazarama, Bertrand Bisimwa… mènent une vie aisée en Ouganda. René Abandi, Kambasu Ngeve, le lieutenant Kavira, Benjamin Bonimpa… regardent de loin le M23.

Bertrand Bisimwa

Au regard des richesses que ces ténébreux rebelles ont accumulées, ils ne peuvent plus s'hasarder à jouer avec le feu face aux Fardc qui montent en puissance sur terrain. Certains Congolais d'origine comme le défunt Christian Badibangi et Roger Lumbala avaient essayé d'appuyer politiquement le M23 pour donner à ce mouvement rebelle pro rwandais une connotation congolaise par rapport à leur « insurrection ».

Kinshasa reste intraitable

Oui aux négociations de Nairobi avec les groupes armés à l'initiative de la communauté des États de l'Afrique de l'est dont la RDC est membre. Mais Kinshasa que d'aucuns taxaient de lâche brandi sa carte. Pour la délégation congolaise, pas question d'intégrer les groupes armés dans l'armée comme ils le souhaitent. Mais le Programme de Démobilisation, Relèvement Communautaire et Réinsertion sociale demeure une opportunité pour les groupes armés et doivent déposer les armes en vue de rejoindre ce mécanisme national.

Le souhait de tout le monde est de voir les Fardc s'organiser pour déloger ces aventuriers des positions qu'ils occupent. Négocier avec eux en obtempérant à leurs revendications, équivaudra à donner une prime aux seigneurs de guerre.