Monde
Rodrigo Duterte a été arrêté mardi par Interpol à son arrivée à l'aéroport international de Manille à la demande de la Cour pénale internationale, qui a émis un mandat d'arrêt contre l'ancien président des Philippines pour sa répression sanglante du narcotrafic lorsqu'il était au pouvoir.
L'ancien président des Philippines Rodrigo Duterte a été arrêté mardi 11 mars 2025 à l'aéroport de Manille en application d'un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) qui le soupçonne de crime contre l'humanité pour sa guerre meurtrière contre les stupéfiants.
Les organisations de défense des droits humains estiment que des dizaines de milliers d'hommes, pour la plupart pauvres, ont été tués par des policiers et des groupes d'autodéfense, souvent sans qu'il soit prouvé qu'ils étaient liés à la drogue.
La CPI a ouvert une enquête sur cette campagne lancée en 2016, susceptible selon elle de constituer un crime contre l'humanité.
"Tôt ce matin, Interpol Manille a reçu la copie officielle d'un mandat d'arrêt émis par la CPI", a indiqué la présidence dans un communiqué. "Il est actuellement en détention."
"L'ancien président et son groupe sont en bonne santé et sont en train d'être examinés par les médecins", a poursuivi la même source.
La CPI maintient sa juridiction
L'ex-dirigeant (2016-2022) de 79 ans revenait d'un bref voyage à Hong Kong et venait d'atterrir à l'aéroport international de Manille.
S'exprimant devant des milliers de travailleurs philippins dimanche à Hong Kong, Rodrigo Duterte avait condamné l'enquête, traitant les enquêteurs de la CPI de "fils de putes", tout en admettant qu'il "accepterait" s'il devait être arrêté.
Les Philippines ont quitté la CPI en 2019 selon ses ordres, mais la Cour basée à La Haye, aux Pays-Bas, a déclaré maintenir sa juridiction en ce qui concerne les meurtres qui se sont passés avant le retrait du pays, ainsi que pour les meurtres commis dans la ville de Davao, à l'époque où Rodrigo Duterte y était maire, avant qu'il ne devienne président.
Plus de 6 000 personnes ont été tuées lors des opérations antidrogue sous la présidence de Rodrigo Duterte, selon les données officielles publiées par les Philippines. Les procureurs de la CPI estiment de leur côté que le nombre de morts se situe entre 12 000 et 30 000.
L'ancien président reste extrêmement populaire aux Philippines où nombreux sont ceux qui ont soutenu ses solutions rapides à la criminalité. Il reste une puissante force politique et est en lice pour retrouver son poste de maire aux élections de mi-mandat en mai.
L'ancien conseiller juridique de la présidence, Salvador Panelo, a qualifié d'"illégale" l'arrestation de Rodrigo Duterte.
"La police nationale philippine n'a pas autorisé l'un de ses avocats à le rencontrer à l'aéroport et à remettre en question la base juridique de (son) arrestation", a-t-il argué, ajoutant qu'aucune copie papier du mandat d'arrêt de la CPI n'avait été fournie.
"Développement très positif"
Un groupe de soutien aux mères des personnes tuées dans le cadre de la répression antidrogue de Rodrigo Duterte a lui qualifié l'arrestation de "développement très positif".
"Les mères dont les maris et les enfants ont été tués à cause de la guerre contre la drogue sont très heureuses car elles attendaient cela depuis très longtemps", a déclaré à l'AFP Rubilyn Litao, coordinatrice de l'association Rise Up for Life and for Rights.
Human Rights Watch a de son côté appelé le gouvernement du président Ferdinand Marcos à "remettre rapidement (Duterte) à la CPI", estimant que cette arrestation constituait une "étape cruciale dans l'obligation de rendre des comptes aux Philippines".
Se définissant lui-même comme un tueur, Rodrigo Duterte a demandé à ses agents de police de tirer mortellement sur les personnes soupçonnées de trafic de stupéfiants si leur vie était en danger.
Il a insisté sur le fait que la répression avait permis de sauver des familles et d'éviter que les Philippines ne se transforment en un "État narco-politique".
Rodrigo Duterte a fermement défendu sa guerre meurtrière contre la drogue en octobre dans le cadre de son audition au Sénat, qui enquête sur les meurtres à grande échelle durant cette période.
"Ne remettez pas en question mes politiques, car je n'ai pas d'excuses, pas de prétextes. J'ai fait ce que j'avais à faire et, que vous le croyiez ou non, je l'ai fait pour mon pays", a déclaré Rodrigo Duterte.
Un temps pressentie pour succéder à son père, sa fille Sara Duterte s'est retirée en faveur de Ferdinand Marcos, fils de l'autocrate du même nom, à qui elle s'est alliée, avant d'être élue à la vice-présidence.
Mais l'alliance entre les deux dynasties a implosé récemment, à l'approche des élections de mi-mandat prévues l'année prochaine. Sara Duterte fait face à trois plaintes pour destitution.
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