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Conflit à l'Est : les raisons de l'inefficacité de la Monusco !

2025-02-19
19.02.2025
2025-02-19
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La récente prise des villes de Goma et de Bukavu par les rebelles marque un tournant dans le conflit armé qui ravage l'est de la République démocratique du Congo depuis plusieurs années. Alors que l'insécurité atteint un niveau alarmant, le rôle de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (Monusco) suscite de vives critiques. Présente depuis 26 ans, cette mission onusienne peine à remplir sa mission principale de protection des civils.

Le chercheur Thierry Vircoulon, auteur d'une récente étude sur la Monusco, explore les raisons de son inefficacité, son absence remarquée face à la résurgence du mouvement rebelle M23 Mouvement du 23 mars soutenu par le Rwanda) et les conséquences de cette crise sur la sécurité des populations locales.

Quelles sont les principales raisons de l’inefficacité de la Monusco, selon vous ?

Paradoxalement, la Monusco est inutile dans ses missions officielles (protéger la population civile, renforcer les institutions de l’Etat congolais et soutenir la réforme du secteur de la sécurité) mais utile pour remplir d’autres fonctions. Depuis 26 ans, la violence contre les civils est continue dans l’Est congolais où l'on compte 7 millions de déplacés. L’Etat congolais reste à la fois fragile et prédateur. Et la réforme du secteur de la sécurité se fait toujours attendre. L’utilité de la Monusco est ailleurs. Elle fournit par exemple un alibi moral aux membres du Conseil de sécurité qui prétendent ne pas vouloir faire deux fois la même erreur après la décision déplorable de retrait des casques bleus pendant le génocide contre les Tutsis au Rwanda en 1994.

Pour les autorités congolaises, elle a constitué le bouc-émissaire parfait. Pendant longtemps, elle leur a permis d’imputer à l’ONU leur incapacité à rétablir la sécurité dans l’Est du pays et ainsi de détourner le mécontentement des populations. Pour l’opinion publique congolaise, elle incarne l’hypocrisie de la soi-disant « communauté internationale », c’est-à-dire des Occidentaux.

Enfin, du point de vue de l’économie locale, la Monusco est un acteur important en raison des retombées financières de sa présence de 26 ans (salaires, loyers, importation de carburant, etc.). A défaut d’accomplir les missions définies dans son mandat, la Monusco remplit bel et bien d'autres fonctions en RDC.

Pourquoi la Monusco n’a-t-elle pas joué de rôle actif face à la résurgence du conflit du M23 en 2022, contrairement à la période 2012-2013 ?

Lors du premier conflit du M23 en 2012-2013, l’ONU a joué un rôle de premier plan dans le règlement diplomatico-militaire du conflit. Pour provoquer sa réaction, il a certes fallu que le M23 prenne Goma et que les casques bleus soient qualifiés de « touristes ». Mais une offensive coordonnée de l’armée congolaise et de la Monusco dotée d’un mandat d’imposition de la paix repoussa le M23 sur le terrain tandis que, sous l’égide du secrétaire des Nations Unies de l’époque, Ban ki-Moon, les chefs d’Etat de la région, y compris ceux qui soutenaient secrètement le M23, signèrent un nouvel accord de paix (l'Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la RDC et la région, dit Accord-cadre d'Addis-Abeba.

Or, depuis la résurgence du conflit du M23, l’ONU entretient une sorte de présence-absence difficile à comprendre. Elle a délégué les rôles de médiation et d’interposition à des acteurs et des organisations africains. Un double processus de médiation a été confié aux présidents du Kenya et de l’Angola. Et le « containment » du M23 a été délégué d’abord à l’East African Community (EAC), puis à la Southern African Development Community (SADC). Bien qu’elle dispose d’un envoyé spécial pour les Grands Lacs (le diplomate chinois Huang Xia) et de plus de 10 000 casques bleus sur le terrain, l’ONU a décidé de rester en retrait dans la gestion de ce conflit.

Paradoxalement, alors que le conflit du M23 prenait de l’ampleur, elle planifiait son retrait et a retiré à marche forcée ses contingents de la province Sud Kivu en 2024. Cette position en retrait de l’ONU correspond à l’idée que les conflits africains doivent être réglés par les Africains. Malheureusement, la probabilité de succès de cette politique est très faible. Initiée il y a 25 ans, l'Architecture de Paix et de Sécurité en Afrique est encore peu efficace.

Dans le cas du conflit du M23, le double processus de médiation confié aux présidents kenyan et angolais a échoué. Et les forces de la SADC ont été débordées par le M23. L’échec d’une solution africaine pour ce conflit africain laisse maintenant l’ONU face à un choix perdant-perdant. Le départ des casques bleus alors que la situation sécuritaire s’aggrave dans l’Est congolais est, en effet, difficile à justifier. Mais il est tout aussi difficile de justifier qu’ils soient les simples spectateurs d’un conflit sur le point de se régionaliser.

Quelles sont les conséquences de l'inefficacité de la Monusco sur la sécurité des populations ?

En 26 ans, plusieurs tueries de civils ont eu lieu dans les zones de déploiement de l'ONU. Pourtant, les responsables de la Monusco, dont la principale mission est la protection de la population, n’ont reconnu leur échec qu’à de très rares occasions. Après le massacre de Mutarule en 2014, le chef de la Monusco s’était publiquement excusé. En janvier dernier, la prise de Goma a fait environ 3000 morts. La principale conséquence de l’inefficacité de la Monusco a été le discrédit populaire.

Ce discrédit populaire est très partagé dans la population congolaise et a donné lieu à des manifestations hostiles et parfois instrumentalisées contre la Monusco. En 2023, une manifestation contre la Monusco à Goma a dégénéré : 56 personnes ont été tuées et plus de 80 ont été blessées par les forces de sécurité congolaises. Amnesty International a identifié les militaires responsables de cette tuerie.

Le sentiment populaire anti-Monusco aboutit à une demande de départ pressante. Selon un sondage réalisé en 2022, 44 % des Congolais interviewés prônaient le départ immédiat de la Monusco et seulement 15 % d’entre eux estimaient qu’elle devait partir après la résolution des conflits. La demande d’un départ immédiat atteignait même 67 % au Nord-Kivu.

Ce sentiment populaire anti-Monusco a été exploité par les gouvernements congolais successifs et attisé par des trolls sur les réseaux sociaux. La Monusco souffre d’une irrémédiable crise de légitimité.

Après 26 ans de présence continue, la Monusco est jugée inutile. Quelles leçons l’ONU doit-elle en tirer pour ses futures missions ?
Je doute qu’il y ait de futures missions. En fait, on est en train de vivre la fin du maintien de la paix, et peut-être même la fin de l’ONU. En quelques années, plusieurs missions ont été fermées dans des pays qui sont encore en guerre (Minuad en 2021 au Soudan, Minusma en 2023 au Mali) et le retrait de la Monusco a commencé en 2024 en RDC. De manière très révélatrice, ces missions de l’ONU ont pris fin dans des pays qui sont toujours en plein conflit et la seule nouvelle mission a été décidée en 2023 pour Haïti. Par ailleurs, la nouvelle administration américaine menace de porter un coup violent, si ce n’est fatal à l’ONU, en supprimant d’importants financements.

En Afrique, la solution consiste à remplacer les casques bleus par les forces des organisations régionales ayant un mandat de paix et de sécurité. Mais, comme l’a montré la longue liste des opérations de paix africaines sur le continent et le déploiement des forces de la Communauté d'Afrique de l'Est (EAC) puis de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) au Nord Kivu, ces organisations ne sont pas plus efficaces que l’ONU. Elles le sont même moins en raison de leurs insuffisances capacitaires et financières.

Si leur manque de fonds peut être en théorie résolu par la possibilité de financer les missions de paix de l’Union africaine et des organisations régionales africaines par le budget de l’ONU (résolution 2719 du Conseil de sécurité adoptée à la fin de l’année 2023, certains membres du Conseil de sécurité y sont réticents, car l’ONU serait alors le principal bailleur des missions sans pouvoir décider de leur fin. La peur des missions de paix sans fin plaide contre la mise en œuvre de cette solution financière.

Quelle option voyez-vous pour pallier les défaillances des uns et des autres ?

Il n’y a pas d’autres acteurs de paix susceptibles d’assumer efficacement les missions de médiation et d’interposition dans des contextes de guerre. En revanche, l’ONU, l’UA et les organisations régionales africaines doivent améliorer leur coordination qui laisse aujourd’hui beaucoup à désirer.

La Monusco et la force de la SADC dans l’Est du Congo n’ont pas travaillé ensemble mais plutôt côte à côte. La rivalité et la méfiance doivent céder la place à la coordination et la complémentarité.

 


The Conservation / MCP, via mediacongo.net
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BIBI @GR3UJ9N   Message  - Publié le 19.02.2025 à 08:13
la raison est tout simplement l'inefficace de notre armée et ce, par manque d'encadrement et des moyens. Aide-toi, le ciel t'aidera. La seule solution est de chasser le ventripotent du pouvoir, qu'il aille trainer sa bedaine sous d'autres cieux, afin de détruire son système qui a mis tout est un pays à genou. DEBOUT CONGOLAIS.

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Congo Nouveau @RPTX2JX   Message  - Publié le 19.02.2025 à 08:08
Avec ou sans la Monusco, mon peuple continue à être massacré par des criminels rwandais et leur supplétifs congolais. Le Gouvernement est aussi incapable de protéger sa population. La MONUSCO peut donc plier bagages. Tous ceux qui sont venus nous appuyer militairement peuvent aussi rentrer chez eux. Qu'on nous laisse alors seuls et si on veut nous exterminer tous, le peuple seul se défendra et se libérera du néocolonialisme occidentale qui passe par l'utilisation du Rwanda pour déstabiliser le grand Congo. La Patrie ou la Mort, nous vaincrons !

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Ally @V8RNSSE   Message  - Publié le 19.02.2025 à 07:39
Des soldats de la Monusco ont laissé des enfants à Goma, Bukavu, Uvira, etc. Comment gagner la guerre quand le coeur d'un soldat est divisé entre sa vie, sa famille au pays natal et sa nouvelle jolie fille acquise à Goma? Toujours est-il que c'est une violation du code de conduite de la Monusco.

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