Monde
Ahmed al-Chareh estime que cette mesure permettra le retour des réfugiés au pays. En treize ans de guerre civile, les restrictions économiques pour faire pression sur le régime syrien se sont accumulées et pèsent sur le quotidien des civils.
Lors d’un entretien lundi avec une délégation de diplomates britanniques, Abou Mohammed al-Joulani (Ahmed al-Chareh, de son vrai nom), le chef de la coalition dominée par des islamistes qui a pris le pouvoir en Syrie, a « souligné la nécessité de lever toutes les sanctions imposées à la Syrie afin de permettre le retour des réfugiés syriens dans leur pays ». Selon lui, cette mesure est cruciale pour permettre le retour des millions de personnes qui ont fui le pays.
Depuis treize ans, la Syrie est soumise à un régime sévère de sanctions internationales prises en réponse à la répression du régime contre les civils par l'Union européenne, les États-Unis, la Ligue arabe, mais aussi des pays comme le Canada, l'Australie ou la Suisse.
Treize ans de restrictions économiques
Ainsi outre l'interdiction d'exporter des armes vers la Syrie, depuis 2011, l'UE a sanctionné 289 individus et 70 entités, parmi lesquels des membres du gouvernement, des hommes d'affaires influents et des entités soutenant le régime en gelant leurs avoirs et en leur interdisant de pénétrer sur le territoire de l'UE. La Syrie ne peut pas non plus importer des équipements et des technologies susceptibles d'être utilisés à des fins de répression interne. Les sanctions visent aussi des secteurs économiques profitables au régime, comme celui du pétrole, qui représentait environ 20% du PIB avant-guerre : interdiction d'importer du pétrole syrien et d'investir dans l'industrie pétrolière du pays.
Les États-Unis ont également adopté des sanctions sévères depuis 2011. Au-delà du gel des avoirs du gouvernement syrien et de ses partisans et d'un embargo pétrolier, aucun produit ou service ne doit sortir du territoire américain ou être issu d'entreprises américaines à destination de la Syrie.
La Ligue arabe a aussi rapidement gelé les actifs du régime et interdit les investissements des États membres en Syrie. Puis le Canada, l'Australie et la Suisse ont pris des sanctions économiques et financières contre le régime. Le Canada a interdit toute importation de biens depuis la Syrie, ainsi que l'exportation de produits de luxe vers le pays, les services financiers en lien avec la Syrie et tout investissement dans le pays.
De son côté, l'ONU n'a pas pris de sanction contre le régime syrien. Plusieurs projets de résolution du Conseil de sécurité des Nations unies en ce sens ont été rejetés après les vétos de la Chine de la Russie.
En 2019, les États-Unis ont encore resserré l'étau avec le « Caesar Syria Civilian Protection Act » (Loi César) qui prévoie des sanctions contre toute entreprise ou individu collaborant avec le gouvernement syrien, en particulier dans les secteurs militaire, commercial, de la construction, de l'énergie et de l'ingénierie. Cette loi interdit les transactions avec des entreprises tierces commerçant avec la Syrie.
Censées faire pression sur le régime en l'asphyxiant économiquement, ces sanctions ont aussi rendu la vie des Syriens encore plus difficile : les pénuries sont fréquentes et les prix ont flambé. Car même si elles ne concernent pas les biens humanitaires et ne ciblent pas officiellement les produits alimentaires, de première nécessité, ainsi que les produits médicaux et sanitaires, dans la réalité, ces restrictions compliquent sérieusement les exportations, par exemple de médicaments ou de matériel hospitalier vers la Syrie.
Après les déclarations, l'UE attend « des actes »
La chute de Bachar el-Assad signe-t-elle la fin de ces sanctions ? La situation reste complexe. Car le groupe rebelle qui a renversé le président syrien Bachar el-Assad, Hayat Tahrir al-Sham (HTS), fait lui-même l’objet de sanctions et est considéré comme une organisation terroriste par les Nations unies, tout comme son chef Ahmed al-Chareh. Malgré les propos rassurants du nouvel homme fort de Damas, la prudence reste de mise.
Depuis quelques jours, les diplomaties occidentales font montre de bienveillance à l’égard de la nouvelle Syrie. Washington a annoncé des « contacts directs » avec le HTS, mais le groupe figure toujours sur la liste des organisations terroristes.
En visite à Damas dimanche, l’envoyé de l’ONU Geir Pedersen a déclaré, sans donner plus de détails : « Nous pouvons espérer une fin rapide des sanctions afin que nous puissions voir un ralliement autour de la construction de la Syrie ».
Ce mardi, le drapeau tricolore a été hissé sur le siège de l’ambassade de France à Damas, fermée depuis 2012, à l’occasion de l’arrivée dans la capitale de l’envoyé spécial français pour la Syrie, rapporte notre correspondant à Beyrouth, Paul Khalifeh. « La France se prépare à être aux côtés des Syriens », a assuré Jean-François Guillaume.
Malgré ces déclarations, côté européen, la levée des sanctions n'est pas pour tout de suite, a prévenu Kaja Kallas lundi, lors d'une réunion avec les ministres des Affaires étrangères des Vingt-Sept à Bruxelles. La responsable de la diplomatie européenne a fixé un certain nombre de conditions préalables, dont la protection des minorités et des droits des femmes au sein d'un gouvernement qui désavoue l'extrémisme religieux. « L'une des questions est de savoir si nous sommes en mesure, à l'avenir, d'envisager l'adaptation du régime de sanctions. Mais ce n'est clairement pas la question d'aujourd'hui, mais plutôt celle de l'avenir, lorsque nous aurons constaté que les mesures prises vont dans la bonne direction », a déclaré Kaja Kallas lors d'une interview à l'agence Reuters. Pour l'instant, a-t-elle ajouté, le HTS les déclarations du HTS « vont dans le bon sens », mais le groupe serait jugé sur ses actions.
Ce mardi, la cheffe de la diplomatie européenne a annoncé que l'Union était « prête » à rouvrir son ambassade à Damas.
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Ils nous font confiance
Le chef du HTS Ahmed Hussein al-Chara, avec l'envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie, Geir Pederson, à Damas, le 16 décembre 2024. AP