Economie
À l'aube de 2024, l'économie mondiale semble se redresser après la récente hausse des taux d'intérêt. Cependant, des signaux de ralentissement persistent, notamment une croissance économique mondiale prévue à 2,4 %, la plus faible des demi-décennies depuis 1990 selon la Banque mondiale. Ce ralentissement économique mondial aura des implications importantes pour la République démocratique du Congo (RD Congo), en tant qu'économie en développement. La croissance économique plus lente au niveau mondial peut entraîner des défis supplémentaires pour le pays, compromettant ses objectifs de développement et son engagement à éliminer l'extrême pauvreté.
Dans un contexte d’offre abondante, l'essoufflement des secteurs de l’industrie lourde et de la construction résidentielle en Chine s’est vu compensé par la résilience de la demande dans la fabrication de produits liés aux énergies renouvelables et abondamment consommateurs desdits métaux. Après une baisse de près de 12 % en 2023, les prix des métaux de base devraient décliner de 5 % en 2024 en raison principalement d’un ralentissement de la demande. Les prévisions anticipent toutefois une remontée des cours en 2025, à la suite du redressement de l’activité mondiale et de l'accélération de la demande de métaux nécessaires aux technologies d’énergie renouvelable.
Or, l’économie du pays est étroitement liée aux fluctuations des prix des produits de base de sorte qu’un ralentissement économique mondial entraînera inéluctablement une baisse de la demande de produits de base, ce qui aura un impact négatif sur les exportations de la RD Congo. Cela entraînera une baisse des recettes fiscales du gouvernement, ce qui pourrait réduire sa capacité à financer ses programmes sociaux et de développement. En effet, d’après les données de la banque mondiale, sur fond du ralentissement de la demande, les cours des métaux ont baissé de 2 % au troisième trimestre 2023 comparativement à leurs niveaux au 2ème trimestre de la même année. Ces prix se situent en effet depuis lors à peu près au même niveau qu’il y a un an (avant le boom de 2022).
Un ralentissement économique mondial pourrait entraîner une hausse du chômage et de la pauvreté avec une probabilité importante d’exacerber les tensions sociales et politiques dans ces pays. En effet, la décennie des années 2020-2030, qui devait être une décennie de transformation et de forts progrès dans le cadre des Objectifs du Développement Durable (ODD), semble se résumer en une décennie d’opportunités gâchées à cause notamment de la faiblesse de la croissance économique qui menace de compromettre les grands impératifs mondiaux et qui rend difficile la génération d'investissements nécessaires pour des domaines cruciaux tels que la lutte contre le changement climatique, l'amélioration de la santé et de l'éducation.
La RD Congo comme plusieurs pays dont les économies sont fortement dépendantes des exportations des produits de base sont particulièrement vulnérables face à ces sombres perspectives. La petite économie ouverte congolaise a besoin d'une croissance économique forte pour réduire la pauvreté et améliorer les conditions de vie de sa population. Néanmoins, face à ces défis, la RD Congo peut tirer des leçons de l'expérience mondiale en adoptant des politiques axées sur la création d'un boom d'investissement, en stimulant la croissance de la productivité pour la réduction de la pauvreté et l'amélioration des conditions de vie. Pour ce faire, il s’avère crucial d’éviter les politiques budgétaires préjudiciables dans ce contexte économique mondial peu certain.
En tant qu'exportateur de produits de base, la RDC peut s’en sortir et réduire sa vulnérabilité en adoptant des politiques budgétaires contracycliques. La réduction ou le bannissement de la procyclicité dans les politiques budgétaires et la mise en place de cadres disciplinaires peuvent atténuer les effets des dangereuses fluctuations des cours des produits de base sur l'économie et maintenir un cadre macroéconomique relativement à l’abri des yoyos des marchés mondiaux.
Les pays exportateurs de produits de base comme la RD Congo peuvent également poursuivre les efforts visant à diversifier leurs économies en investissant dans d'autres secteurs tels que l'agriculture, le tourisme et les services. Cela aiderait à réduire progressivement et même définitivement la dépendance aux produits de base et à les rendre plus résilients aux chocs économiques. C’est à ces conditions que même si les années 2020 ont été marquées par des promesses non tenues au niveau mondial, un redressement significatif des économies dépendantes pourrait se faire remarquer. Si les gouvernements agissent rapidement en réorganisant leurs politiques budgétaires, les grands pays exportateurs des produits de base comme la RD Congo pourraient regagner le terrain perdu et continuer d’espérer en la réalisation des objectifs mondiaux de développement d'ici 2030-2060.
Les forces de la RDC résident dans ses abondantes ressources naturelles et son potentiel de développement dans des secteurs tels que l'agriculture, le tourisme et les services. Cependant, ces atouts sont contrebalancés par des faiblesses structurelles telles que la pauvreté, la corruption et l'insécurité, qui entravent la croissance économique et le bien-être de la population.
Avec ses ressources naturelles abondantes et un potentiel de développement important dans des secteurs comme l'agriculture, le tourisme et les services et face à des défis tels que la forte pauvreté, la corruption et l'insécurité qui entravent la croissance économique et le bien-être de sa population, la RDC doit entreprendre des réformes économiques et politiques audacieuses comprenant l'adoption de politiques budgétaires contracycliques pour stabiliser l'économie face aux fluctuations des prix des produits de base. Il est également crucial d'investir dans la diversification de son économie pour réduire la dépendance aux exportations de produits de base. Parallèlement, des mesures visant à renforcer l'état de droit, à lutter contre la corruption et à promouvoir la bonne gouvernance sont nécessaires pour créer un environnement propice aux investissements et à la croissance durable.
*Caleb Bonyi MUKADI MUKANDILA est économiste (Université de Kinshasa/Université Grenoble Alpes/Toulouse School of Economics). Ce point de vue est personnel et donc n’engage aucune de ses institutions d’appartenance.
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