Drame de Kwamouth, Muzito palpe le désastre et lance un SOS

Trois jours de marche. À pied et quelques fois à bord de son véhicule, le leader du Nouvel Élan est un homme très affecté de voir et d’entendre les récits des victimes des tueries de Kwamouth, dans le Grand Bandundu. Le conflit a engendré des morts, des déplacés et des villages entiers incendiés.

Impossible pour Adolphe Muzito de garder sa jeep. À chaque fois, il faut descendre, faire des marches et découvrir les décombres des habitations parties en fumée à la suite du conflit entre les Teke et Yaka. Une guerre interethnique qui ensanglante des centaines de villages et jete sur des sentiers et dans les forêts, des milliers d’individus.

La situation frôle l’hécatombe. “Je marche à pied pour voir de mes propres yeux, que j’entende de mes oreilles ce qui se passe ici. J’ai quitté Kinshasa, je suis arrivé à Munkata, j’ai trouvé les déplacés, et j’ai apporté un petit soutien pour un début de soulagement”, a expliqué l’ancien Premier ministre aux populations de Kwamouth nombreusement rassemblées au clair de lune dans la soirée.

Adolphe Muzito Mfumu MPa se devait d’offrir des vivres et des non vivres à ces rescapés qui manquent de tout. Plus d’habitation, de nourriture, pas d’argent et sans aucune condition de sécurité rassurante.

“Nous nous sommes déplacés avec deux véhicules seulement. Tout au long du chemin, nous avons vu des gens en train de se déplacer, les enfants qui naissent en cours de route et d’autres même qui meurent à cause de la faim et aussi suite à des longues distances faites à pied”, a résumé le leader de Lamuka devant son peuple. Ces villageois vivent au jour le jour, a constaté le président du Nouvel Élan.

Dans une insécurité de plus en plus croissante, décrit-il, “les populations n’arrivent plus à aller aux champs ni à la pêche. Ils ne savent plus les faire parce qu’ils ne savent pas qui ils vont rencontrer en route”, s’attriste-t-il.

80% de villages incendiés, Muzito lance un SOS

Muzito qualifie le drame bandundois de grave. Une situation qui doit interpeller et appeller des mesures fortes de réparation et de stabilisation sécuritaire à la fois de la part du gouvernement que des organisations humanitaires.

“Ce qui nous est arrivé est grave”, a fait savoir le ténor Lamuka qui évoque un constat humanitaire dramatique avec “près de 80% de villages incendiés, les populations se retrouvent dans la brousse, à la belle étoile. C’est triste”, déplore-t-il.

Muzito dit avoir échangé avec certains chefs des villages incendiés et leur a laissé de l’aide. “Plusieurs villages incendiés sont inoccupés. Les autorités doivent renforcer la sécurité dans les villages où il n’y a pas des forces de l’ordre”, a-t-il plaidé. Adolphe Muzito demande “aux autorités de donner les armes aux militaires”. Appel lancé également aux organismes internationaux d’intervenir de toute urgence car la vie des citoyens est en danger. “Nous faisons aussi appel aux ONG pour des missions d’évaluation humanitaire parce que les villageois ont tout perdu”, dit-il.

Muzito plaide pour plus de sécurité dans le Bandundu

L’ancien chef du gouvernement rappelle à l’État ses responsabilités. “Les fautifs dans ce conflit doivent être poursuivis et sanctionnés pour servir d’exemple”, estime-t-il.

Le “résistant” explique que la RDC est à tous les Congolais et que “la cohabitation est une grande qualité des ressortissants de Kwamouth”, valeur qu’il convient d’entretenir pour les générations futures, affirme-t-il. Pour Muzito, la justice et la vérité constituent la base de toute édification de l’État. “De toute urgence, je demande aux autorités de renforcer la sécurité ici. Si nous n’arrivons pas à résoudre cette affaire, je ne sais pas où nous allons avec ce pays”, a interpellé le président national de Nouvel Élan.

Pour ce qui concerne la titrisation de terres et la reconnaissance de droits, l’État est le premier ennemi, souligne l’ex-bras droit d’Antoine Gizenga, parce que “sur ce point, l’État n’a jamais mis de l’ordre depuis notre accession à l’indépendance”.

Comme politique, il veut mobiliser leaders et notables communautaires pour les impliquer efficacement dans la résolution des conflits à la base. Surtout, veut-il travailler à l’unité de l’élite locale.

“Je vais parler avec les jeunes, les autorités administratives, politiques, la société civile sans oublier les chefs coutumiers“, a indiqué l’ancien PM. Mfumu a passé nuit à Kwamouth multipliant d’entrevues notamment avec les notables et chefs locaux afin de s’imprégner d’amples détails sur cet épineux drame de Kwamouth. Jeudi soir, il a finalement regagné Kinshasa avec un coeur déchiré.