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est allé à la rencontre de
Yves Mayilamene Ngandor,
un jeune congolais, qui à force de travail, a su relever de nombreux
défis jusqu'à se hissé à un haut niveau de management
d'entreprise au plan international. Yves, " Ngador " pour les proches,
est né un certain 06 décembre 1970 à Kamina (RDC), second
d'une famille de 7 enfants (2 garçons et 5 filles). De par la profession
de son père, administrateur de territoire, Yves a eu la chance de sillonner
le Congo dès le bas âge, raison pour laquelle il peut s'exprimer
sans beaucoup de peine dans les quatre langues nationales (kikongo, lingala,
swahili et tshiluba). Directeur des Ressources Humaines pour l'Afrique de l'Est
à la BAT, il vient au moment où nous rédigeons cet article,
de quitter la BAT pour la multinationale des telecoms, Celtel International
BV, où il occupera le poste de Directeur des Ressources Humaines pour
l'Afrique, poste basé à Amsterdam (Pays-Bas). Nous vous livrons
ci-dessous l'interview qu'il nous a accordée. Une conversation directe,
détendue et franche :
Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
J'ai eu un parcours un peu spécial, spécial parce que j'ai souvent
été amené à changer d'école en fonction du
lieu de mutation de mon père, qui était alors administrateur de
territoire. J'ai fait l'école maternelle à Mbanza-Ngungu dans
le Bas-Congo, ainsi que ma 1ère et ma 2ème année primaire,
j'ai poursuivi la 3ème et la 4ème à Kenge (Bandundu) au
lycée Kivuvu ki Kwango (les anciens se reconnaîtront). J'ai terminé
mes études primaires à Kananga dans le Kasaï, 5ème
et 6ème (Diku Dietu).
Quant à mes études secondaires, je les ai commencées à
la mission Catholique de Kinzambi à Kikwit comme interne (1er et 2ème
année Secondaire). Ceci est un des épisodes cruciaux de ma vie
qui a forgé mon caractère, mon indépendance d'esprit et
mon sens du pragmatisme.
J'ai ensuite rejoint le collège Bandayi de Kananga pour quelques mois
avant de partir avec mes parents à Lubumbashi ou j'ai terminé
ma 3ème année à l'école Maadini de la Gécamines.
Cette année scolaire s'est soldée par un échec lamentable,
je m'en souviens encore comme si c'était hier. Dieu merci, j'ai repris
l'année avec succès mais vers la fin de l'année scolaire
j'ai perdu mon père, qui n'a pas survécu à une opération
subie à l'hôpital de la Gécamines à Likasi.
Ma mère, mon frère,mes soeurs et moi, sommes rentrés nous
installer à Kikwit dans la province natale de mes parents, tout en gérant
un conflit judicaire avec la famille paternelle qui voulait nous mettre dehors
et récupérer les biens de leur frère ou oncle. J'ai encore
beaucoup du mal aujourd'hui à m'approcher de la famille de mon père.
C'est pour vous dire que j'en ai gardé un bien triste souvenir
Ma mère m'inscrira à l internat du Collège Mikasa à
Leverville (Lusanga) pour faire ma 4ème, ensuite je serais transféré
avec ma sur Giselle Bafkoma au Collège Jésuite de St François
Xavier de Kikwit (Sadisana) où j'obtiens en 1989 mon diplôme d'état
avec mention parmi les lauréats de la république. Cette Mention
me permettra plus tard de poursuivre mes études universitaires en Belgique.
Après un bref passage à l'université de Kinshasa, j'ai
poursuivi et terminé mes études universitaires à l'université
de Mons Hainaut en Belgique, couronnées en 1996 par un diplôme
d'ingénieur Commercial. J'ai aussi fait un MBA à l'université
flamande VUB à Bruxelles. J'ai également eu l'opportunité
de parfaire mon anglais pendant 8 mois à la Columbia University de New
York aux USA
Et votre parcours professionnel ?
J'ai débuté ma carrière professionnelle comme Management
Trainee à la TABAZAIRE (filiale de l'ancien groupe anglo-sud-Africain
Rothmans). Juste après ma formation d'anglais aux USA, je suis tombé
sur une offre de Rothmans qui cherchait de jeunes congolais (zaïrois à
l'époque). Je me suis donc envolé pour Kinshasa le 1er décembre
1998 et deux jours après j'étais à Tshikapa. Après
quelques mois de formation, j'ai décroché mon premier poste de
management basé à Lubumbashi, comme adjoint au Directeur des Ressources
Humaines (José Kasonga) auprès de qui j'ai beaucoup appris. Après
la fusion de BAT et Rothmans, je suis nommé responsable de la rémunération
pour la nouvelle société, mon objectif principal était
de définir et de mettre en place la stratégie, la politique ainsi
que la structure de rémunération pour la nouvelle BAT. J'ai occupé
cette position pendant trois ans. Mais suite à des malentendus ou manipulations
politiciennes, je n'ai pas pu accéder à la fonction de Human Resources(HR)
Director au Congo. Je suis allé à la BAT Suisse pour un an comme
HR Project manager. Après la Suisse, j'ai été affecté
en Afrique de l'ouest, brièvement à Abidjan comme Resourcing and
Development Manager pendant un an et ensuite Comme Human Resources Manager pour
l'Afrique de l'Ouest - Nord en charge de 11 pays. Au premier Mars de cette année
j'ai été nommé comme Group HR Diretor pour BAT East Africa
Community, poste basé à Nairobi(Kenya) et en charge des opérations
pour l'Afrique de l'Est. Au moment où nous couchons ces textes, j'ai
décidé de quitter le groupe BAT et de changer de secteur d'activités,
je vais donc à partir du mois de juin prochain occuper le poste de Human
Resources Director (Expertise & Resources) pour le Groupe Celtel International
B.V. , poste basé à Amsterdam (Pays-Bas)
Pouvez-vous nous décrire la fonction de DRH (directeur des Ressources
Humaines) que vous occupée de nombreuses années ?
Je peux décrire ma dernière fonction en Afrique le l'Ouest et
de l'Est. En effet en tant que Directeur régional de Ressources Humaines,
mes attributions principales étaient de coordonner et de diriger la politique
de ressources humaines afin de soutenir le Business à atteindre ses objectifs.
Les axes principaux sont la gestion de la rémunération, la gestion
de talents, la politique de recrutements, la gestion des carrières et
l'élaboration des plans de successions, la gestion des performances individuelles
et collectives
sans oublier la gestion des relations industrielles (règlements
intérieurs, conventions collectives
). Le challenge à ce
niveau est de s'assurer que chaque pays dans mon marché est en ligne
avec nos guidelines et en règle avec la législation locale.
Vos derniers postes ont été basés à l'étranger
(hors RDC). Est-ce un choix ou juste une opportunité qui s'est présenté
?
Je dirais que c'est plutôt une opportunité de carrière s'est
offerte à moi et j'ai décidé de la saisir. En effet, dans
la structure de la BAT, il n'y avait plus de boulot pour moi dans mon pays.
J'avais un rôle régional, condamné à faire une carrière
d'expatrié sauf si un bureau régional s'installe à Kinshasa
ou si j'étais rétrogradé [rires]
Vous avez participé à plusieurs forums de recrutement pour l'Afrique
dont le dernier " Carreers in Africa " de Londres? Que pensez-vous
du positionnement des candidats d'origine congolaise
Je n'ai pas vu beaucoup de candidats congolais lors du dernier forum de l'emploi,
" Carrer in Africa " de Londres, probablement pour des raisons de
visa je suppose. Par contre lors du forum de Bruxelles de l'année passée,
il y en avait beaucoup mais malheureusement nous (la BAT) n'avions pas de positions
à offrir à l'époque. C'est un peu dommage, j'aurais souhaité
rencontrer beaucoup plus de Candidats au forum de Londres car ce dernier est
le forum le plus important, quasiment toutes les multinationales opérant
en Afrique y sont représentées. Au début du mois de juin,
il y aura un autre forum de l'emploi à Bruxelles, j'espère y rencontrer
beaucoup de candidats congolais ou d'origine congolaise.
Pensez-vous que la RDC/l'Afrique regorge assez des ressources humaines et des
compétences (en comptant également la diaspora) pour faire face
aux défis du développement de notre pays/nos pays ? En particulier
des compétences de haut niveau (leadership) ?
Quand tu te ballades à l'étranger, en Amérique, en Europe,
en Afrique du Sud ou en Afrique de l'ouest, c'est assez impressionnant de constater
que les meilleurs médecins, ingénieurs, responsables sont congolais
ou d'origine congolaise, partant du simple secrétaire de paroisse à
Dakar aux ministres en Europe. Ma conclusion est simple, la RDC regorge des
talents mais qui Malheureusement ne peuvent pas forcément s'exprimer
chez eux pour des raisons multiples : culturelles, politiques
.
L'avènement d'une réelle la démocratie au Congo nourrit
des espoirs. Je crois qu'il va apporter un changement drastique dans notre culture
actuelle qui consiste à chérir la médiocrité. Le
simple fait que désormais les mandataires devront être élus
et pas nommés, veut aussi dire qu'ils seront sanctionnés en cas
de médiocrité et d'absence de résultat. L'accès
à la gestion publique devrait donc être assez limité pour
les " farceurs ". Aujourd'hui ce n'est hélas pas encore le
cas, d'où le découragement des bonnes volontés qui de ce
fait cherchent fortune et quiétude ailleurs.
A cela, il faut bien se rendre compte que le système éducatif
chez nous a subi un rabais sérieux en termes de qualité. Il est
par moment écurant de constater le niveau de certains diplômés
sortis fraîchement des universités chez nous. C'est le futur de
notre pays que nous sommes en train de sacrifier. Parce que c'est bien souvent
question de décisions politiques, nos hommes politiques devraient penser
à assurer l'éducation de ceux qui vont gérer leurs retraites.
Il faut y penser, il y va de l'intérêt de tous
vous allez
vieillir un jour et ça sera ces enfants de la rue qui seront adultes
en ce moment-là. Si vous ne les éduquez pas aujourd'hui, votre
sécurité physique, matérielle et même financière
sera en péril, c'est sûr ! (Sauf si vous êtes en exil)
Etes-vous prêt à retourner travailler au pays?
A la fin de mes études je fais le choix de retourner travailler au Pays.
De Tshikapa à Kinshasa en passant par Lubumbashi. C'est en travaillant
au pays que je me suis retrouvé à l'étranger mais tout
en gardant le pays dans le " scope ". Je suis certes à l'étranger
mais j'ai toujours un pied au pays, c'est un peu ça quand on travaille
dans un bureau de coordination régionale ou sous régionale.
Le jour où le Congo se ressaisira et offrira un environnement propice
aux grandes affaires (il en a le potentiel mais manque cruellement d'organisation)
en termes d'infrastructures, sécurité juridique
Je suis
sûr et certain que beaucoup de multinationales installeront leurs "
Headquarter Afrique " à Kinshasa, à l'image de Nairobi, Abidjan,
Dakar ou Johanesbourg (Johannesburg)
Un peu d'organisation administrative,
moins de tracasseries inutiles, un aéroport un peu plus organisé.
Et ça sera parti !
Des Conseils aux jeunes congolais ?
Aux jeunes, je conseille simplement et humblement de ne pas céder à
la facilité et avoir de l'ambition et de bons repères. Quand j'étais
gamin je rêvais d'être médecin, pilote ou " Mobutu ".
Les gamins de Kinshasa aujourd'hui hui rêvent d'être artistes musiciens.
Je crois qu'il appartient à la jeunesse d'aujourd'hui, surtout celle
de la diaspora d'aider à recréer le sens des valeurs nobles et
d'excellence à tous égards.
Je pense qu'avoir une vision dans sa vie et travailler dur est à la clé
de la réussite. Nous avons les capacités, il nous faut saisir
les opportunités
.et il y en a beaucoup !
Et la vie de famille dans tout ça ?
Je suis marié depuis janvier 2001 à la très charmante Maguy
Mafuta. Nous avons deux petits garçons Leonard et Anthony qui ont respectivement
5 ans et 9 mois. Ils se portent tous bien et vivent auprès de leurs papa
et maman à Dakar. Pour des raisons professionnelles je suis souvent en
mission dans l'un ou l'autre pays. Ma famille me donne la motivation et l'envie
nécessaire de réussir dans la vie
Pour écrire à Yves Mayilamene N., veuilllez envoyer un e-mail à
ymayilamene@hotmail.com
Au bureau à Dakar (BAT)
A Dakar, lors du salon de recrutement "Afrique Talents" (2005)
A Dubaï, en marge d'une mision...
Lors d'une réunion RH régionale de la BAT à Istanbul(Turquie)
Un anniversaire fêté avec la grande famille
Au salon Job Fair de Bruxelles (2005)