Immoralité et incivisme dans les funérailles : l’implication des églises attendue

J’ai assisté, les deux dernières semaines, à trois funérailles à Kinshasa. Si l’ordre et la bienséance a régné dans deux d’entre elles, les troisièmes ont offert un spectacle désolant à l’assistance médusée. Ceci n’est d’ailleurs pas une information pour les Congolais, particulièrement les Kinois, qui sont habitués à vivre des scènes extraordinaires de honte et d’impudicité dans les lieux des deuils. 

Il serait utopique de demander à l’état seul de réglementer ce secteur. Les églises devraient fortement s’impliquer dans cette lutte contre l’immoralité et la destruction complète de nos valeurs culturelles.

Le Congolais étant un peuple indiscipliné car conditionné par trois décennies d’encouragement des antivaleurs, il ne suffit pas de prêcher les bonnes manières à l’église. A l’école, les cours de civisme doivent être assurés avec plus d’insistance et de régularité. Mais les églises doivent plus prêcher par l’exemple, c’est-à-dire les actes.

Loin de nous toute tentative de faire de la publicité au profit d’une quelconque organisation, il faut saluer la discipline qui règne lors des funérailles d’un adepte des structures comme  "Les témoins de Jéhovah" et  "le ministère de la Voie internationale".

Qu’il s’agisse du respect du temps, du programme arrêté, ou de l’organisation des obsèques elle-même, l’ordre et la bienséance qui y règnent sont à féliciter. Pour ce qui est du temps, il est extrêmement rare de voir, en dehors de deuils nationaux, des gens respecter le temps qu’ils ont eux-mêmes fixé. Lorsqu’à 5 heures du matin, on annonce la levée de corps pour le cimetière à 13 heures, c’est à 14 heures, au plus tôt, sinon ce sera bien plus tard, que le cortège funéraire s’ébranlera.

Le programme, lui, est souvent bouleversé, retouché sans cesse, au gré des humeurs des uns et des autres, qu’il faut toujours gérer. Et lorsqu’il y a des fortes têtes dans l’un comme dans l’autre camp, cela dégénère souvent en dispute, voire en bagarre.

Quant à l’organisation, elle est impressionnante dans les funérailles organisées par ces deux structures. Il n’y a aucune confusion, comme c’est souvent le cas, avec des lieux forains. On sent qu’on n’est pas dans une fête ou dans une kermesse.

Cette ambiance ordonnée se vit également dans les fêtes qu’elles organisent.

Ailleurs, les funérailles sont devenues des lieux pernicieux, où des jeunes gens s’enivrent sans vergogne au chanvre indien et aux alcools frelatés, avant de s’adonner à des chants, des cris et des danses d’une obscénité révoltante. Les orchestres de fanfare loués sont une autre source d’exécution des chansons et danses qui devraient être prohibées dans une société éprise de bon sens.

Très peu de Congolais se disent incroyants ou athées. La RDC donne même l’impression d’être le pays le plus christianisé de la planète, s’il faut considérer le nombre (on serait tenté de dire excessif) de communautés se réclamant de la chrétienté.

Le goût très prononcé des Congolais pour la prière se remarque également le dimanche matin où toute la ville de Kinshasa vibre au rythme d’un incroyable tintamarre. Mais c’est pratiquement chaque soir que les Kinois affrontent cet infernal vacarme, malgré les incessantes mises en garde des autorités tant politico-administratives que de la police.

Il faut aussi relever le fait que toutes les manifestations organisées par les Congolais, même celles politiques, commencent presqu’inévitablement par la prière depuis quelques décennies. Il n’y a que dans ce pays qu’on voit ce genre de choses.

Les Congolais prient donc beaucoup. Enfin, c’est l’image qu’ils veulent absolument donner. Rarissime sont les obsèques dépourvues d’un office religieux, même si la personne pleurée n’avait jamais mis les pieds dans un temple. Sa famille tient impérativement à lui ouvrir la voie du ciel. C’est du moins ce qu’elle croit.

Si donc les églises s’impliquent vraiment dans les funérailles, particulièrement celles de leurs adeptes - car ailleurs elles rencontreront de fortes et idiotes résistances - en les organisant dans l’ordre et la bienséance, elles aideraient beaucoup l’Etat dans la moralisation de cette population dont une bonne frange est dépravée.

C’est, du reste, l’une des missions capitales qu’une vraie église doit s’assigner. Le changement des mentalités, la lutte contre les antivaleurs sont, doivent être, l’affaire de tous. Il y a des moments où l'on se demande même comment de plus en plus de jeunes filles s’habillent de façon indécente, lorsqu’on sait que pratiquement toutes sont fières d’être adeptes de telle ou telle autre église de réveil.

Pourquoi ces églises laissent-elles faire ? Par peur de perdre des fidèles, ce qui entraînerait la baisse des recettes ? La Bible ne recommande-t-elle pas de s’arracher un œil, s’il est une occasion de chute, que de continuer à s’enfoncer avec ses deux yeux ?