Combien de « sociétés civiles » ?

Constat qui saute aux yeux de quiconque les ouvre pour voir : il y a mille et une société civile sous les tropiques rd congolaises. Il est loin, très loin même l’époque où existait une centrale du mouvement associatif congolais appelé société civile ! Il faut remonter au seuil des années transition.

Face à la dictature titubante de Mobutu et aux manœuvres politiciennes de l’Opposition, la société civile parlait d’une seule et même voix forte. Les églises traditionnelles, les corporations et associations ayant pignon sur rue, bref tout ce que le pays comptait des forces vives non embrigadées dans la politique politicienne, incarnaient la société civile. Et puis s’en est suivie la vassalisation ou l’instrumentalisation de nombre d’animateurs de la société civile par le Pouvoir et… l’Opposition.

Avec la scissiparité de l’espace politique zaïro-congolais, naissait un phénomène bien connu. Bien de chez nous. A savoir, à chaque chapelle politique sa société civile. Ce n’est pas tout. Certains acteurs politiques en mal de positionnement n’hésitent pas à battre pavillon « société civile ». Des associations opportunistes sans ancrage dans le pays réel sortent des bureautiques de Kinshasa avec le label « société civile ». Quelques sorties médiatiques suffisent pour avoir de l’onction.

Normal dans ces conditions que la vraie société civile disparaisse des radars au profit de celle des salons politiques de Kinshasa. Normal que l’on assiste à une kyrielle de « sociétés civiles » au discours plus politique qu’associatif ou corporatiste. Dommage que la principale victime collatérale de cette floraison de « sociétés civiles » toutes kinoises soit la véritable société civile congolaise. Ces associations socioprofessionnelles, ces ONG qui travaillent au quotidien avec les populations, ces confessions religieuses du cru… dont l’action légitime, leur appartenance à la société civile.

Comme dans la théorie de Gresham selon laquelle la mauvaise monnaie chasse la bonne, la version faisandée de la « société civile » chasse, chaque jour qui passe, des pans entiers du mouvement associatif authentique. Et ce ne sont pas les enjeux politiques en vue qui vont arrêter cette mécanique destructrice. Bien au contraire. Sous couvert de la « société civile », certains se positionnent pour le gouvernement de cohésion nationale, d’autres offrent leurs services aux forces politiques qui ont fait de 2016 leur fonds de commerce.