Bas-Congo : à Lukala, un motocycliste termine sa course sous une remorque

Il est deux heures, lorsqu'un motard voulant se dégourdir les jambes décida de faire les cent pas, laissant sa moto au parking. C'est le moment choisi par Mutoba Amedo Six, qui n'avait plus de moto, de faire quelques courses sur la nationale n°1. On l'a vu aller déposer une cliente, une tshel (une professionnelle de sexe) au bar Mama Rosa.

De retour, il s'engage  dans une course à vive allure à la grande surprise de ses collègues et de tout ceux qui ont eu la malchance de suivre cette scène. Comme affolé par quelques dieux, cette course, la toute dernière de sa vie, Six la fera avec beaucoup d'enthousiasme, beaucoup de « loyenge » (beaucoup de folie). Si bien qu'il la termine sous la remorque d'un camion en stationnement non loin du parking dans le sens de Matadi-Kinshasa. Après avoir heurté la remorque, l'infortuné est projeté sur la chaussée : grièvement blessé à la tête avec un œil fortement touché.

C'est la panique. Six est acheminé au HGR IME-Kimpese. En dépit de soins intenses et de la proposition d'un éventuel transfert pour Kinshasa, l'irréparable n'aura attendu que quelques heures. Il mourut ce même lundi vers 17 heures. 

Populaire de par son air blagueur, Six mort, la nouvelle s'est répandue comme une traînée de poudre. Son corps sera gardé à la morgue du même HGR IME-Kimpese jusqu'au samedi 1er févier. Ce samedi là, dès le matin, la cité est couverte par un brouhaha sans nom provoqué par ces motards préparant la grande « fête ». Le spectacle est on ne peut plus désolant et terrifiant : jeunes filles, jeunes garçons sont à trois, à quatre sur de dizaines de motos qui vont tous dans le même sens à travers les grandes artères de la cité. Vrombissements et klaxons assourdissent les tympans de paisibles citoyens. Le spectacle sera  réédité  le dimanche, jour de l'inhumation.

Quelles leçons pour les autres motocyclistes ?

Des leçons, s'il y en a une, elles s'adressent à nous, observateurs ; mais pas aux concernés. Car le comportement pendant les funérailles a démontré, à suffisance, que les motards n'ont ni le cœur à s'apitoyer, ni la tête à comprendre.

Par ailleurs, au delà de tout ce que l'on peut imaginer au sujet de l'accident qui a emporté notre regretté jeune frère, un fait requiert l'attention de l'autorité à tous les niveaux : la moto est un moyen de déplacement, le bienvenu, dans les conditions financières et infrastructurelles de nos milieux. Mais l'insouciance et « l'esprit délinquant » qui hantent bon nombre de motocyclistes doivent être blâmés, corrigés et sanctionnés. Le nombre d'accidentés de moto dans nos hôpitaux et centres de santé en font foi.