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Infos congo - Actualités Congo - Premier-BET - 08 avril 2024
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Les réseaux sociaux nous rendent-ils asociaux ? (Tribunes)

2018-05-07
07.05.2018
2018-05-07
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Les réseaux sociaux abordent les problèmes de la société mais ce faisant ils les radicalisent. Ils transforment les débats en crises autour de scandales. Ils peuvent aussi amener à une altération du réel par volonté de propager des informations fausses mais vraisemblables. Décryptage de leur rôle démocratique par Guillaume Von der Weid, philosophe.

Les réseaux sociaux ont mauvaise presse. Qu'il s'agisse de harcèlement en ligne, de “bulles cognitives”, ou de propagation de fake news, ils seraient contre-productifs, en promettrant plus de social, plus de débat, plus de vérité, tout en ayant l'effet inverse. Qu'en est-il?

Mais avant toute chose, qu'appelle-t-on “réseaux sociaux” ? Car si le terme social est clair, renvoyant au collectif, aux intérêts communs, à l'unité (socius), réseau, lui, est plus ambivalent, à l'image de son origine latine, retis, qui signifie filet. Il a commencé par désigner les infrastructures (réseau routier, électrique), puis les relations informelles (réseaux mafieux, franc-maçons). Or, la connotation du mot, plutôt technique ou négative, s'est renversée, en particulier à la faveur des réseaux sociaux où toutes les questions semblent pouvoir être posées et débattues. Mais y sont-elles résolues? Les réseaux sociaux renforcent-ils l'unité sociale ou l'affaiblissent-ils? Les réseaux sociaux nous rendent-ils asociaux? La réponse peut suivre les trois transformations successives des questions qui s'y posent, celle du problème, de la crise et de la catastrophe.

Radicalisation des problèmes

Or, avant de poser (des) problèmes, les réseaux sociaux les abordent. Qu'est-ce qu'un problème? Deux choses vraies et pourtant incompatibles. Exemple: habiter loin et arriver à l'heure, le besoin infini de santé et les moyens limités de soigner, les progrès techniques et leur capacité destructrice, l'enrichissement et l'inégalité, etc. Or si les réseaux sociaux sont aujourd'hui connotés positivement, c'est qu'étant immatériels, instantanés et immédiats, ils semblent constituer un espace d'échanges sans interférence, d'individu à individu, où les problèmes pourraient être sinon résolus, du moins posés et débattus par les “99%”, comme se nommaient eux-mêmes les militants d'Occupy Wall Street.

Cependant ces trois caractéristiques sont à double tranchant, car elles contribuent à radicaliser les échanges, en transformant les débats autour de problèmes en crises autour de scandales. En effet, l'immatérialité des réseaux entraîne une déréalisation : le monde tel qu'il est compte moins que sa représentation, d'où les fake news, c'est-à-dire des informations distordues par l'interprétation de l'émetteur. Deuxièmement, l'instantanéité d'une connexion universelle nous déconnecte des autres par la disproportion entre nos actions privées et leurs conséquences publiques. Nous postons des invectives ou relayons des images sans prendre conscience de l'impact global de ces "micro-actions". Enfin l'immédiateté, au sens propre, l'absence de médiation, donne l'impression d'avoir accès à la réalité même, alors que la “réalité” est toujours issue d'un cadrage préalable. D'où le paradoxe d'un appauvrissement des débats, tombant dans les préjugés les plus grossiers —même l'IA de Microsoft, "Tay", s'y est laissée prendre en mars 2016, devenant raciste et complotiste en quelques heures de mimétisme— alors même que le nombre de participants augmente.

Ces trois émancipations de la matière, du temps et des intermédiaires, retirant les pilotis de la réflexion, effacent les nuances, la bonne foi, le consensus, et exacerbent les oppositions dans des scandales qu'il faut dénoncer plutôt que penser (cf. "Indignez-vous", "Nuit debout"). Alors que le problème doit produire une résolution utilitariste et consensuelle, la crise polarise le débat par des positions clivantes. Car une crise est davantage qu'un problème: elle est censée révéler un défaut interne, un vice structurel, une faute appelant un jugement (krisis). La question du financement des médicaments, typiquement, au lieu d'être un problème qu'on essaye de résoudre par des arbitrages raisonnables, devient un scandale qu'on dénonce par des critiques manichéennes.

De la crise à la catastrophe

Mais il y a plus grave. Les réseaux sociaux ne font pas qu'aggraver des problèmes en crises, ils peuvent engendrer des catastrophes (élection de Trump, "front antivaccin", Lévothyrox), et contribuer non plus simplement à une radicalisation des opinions mais à une altération du réel. Par un processus auto-alimenté de fake news, de rumeurs orchestrées, de déformations vraisemblables, un magnat peu scrupuleux a été élu à la tête de la première puissance mondiale, des enfants meurent à cause d'une couverture vaccinale en baisse et un médicament doit être retiré du marché en urgence pour contrer un effet nocébo propagé par les réseaux sociaux.

La question devient: pourquoi crée-t-on de “fausses nouvelles” et surtout, pourquoi veut-on les croire? C'est que nous avons besoin de trouver du sens aux événements, et préférons souvent un sens illusoire à une absence de sens. Où la catastrophe se renverse: ce n'est plus la crise qui devient catastrophique, mais la catastrophe qui devient critique, c'est-à-dire révélatrice; plutôt que d'accepter le non-sens d'événements venant frapper notre société de l'extérieur, on veut expliquer la catastrophe par un défaut interne, une intention isolable: comment accepter l'accident d'un enfant qui meurt? Une épidémie ou un tremblement de terre? La disproportion entre cause objective (bactérie, tectonique des plaques) et conséquence subjective (deuil, cataclysme) nous fait chercher dans la cause matérielle l'horreur de la conséquence ressentie.

Ainsi le tremblement de terre de Lisbonne de 1755 fut interprété comme la punition du péché humain ou la conséquence du surpeuplement des villes. De même, l'accident tragique — médical par exemple— doit être le signe d'autre chose. Nos sociétés sécularisées ayant renoncé aux religions et autres grands récits consolateurs, l'absurde n'est plus pris en charge. Le bouc émissaire a remplacé la volonté divine comme facteur explicatif. Avant, c'était la sanction de Dieu, aujourd'hui, c'est la volonté d'une industrie, d'un lobby, d'un complot. Les réseaux sociaux créent des crises qu'ils figent ensuite dans des figures aussi redoutables que les démons ou les tabous de la superstition la plus archaïque.

Par la liberté même qu'ils semblent offrir directement aux individus, les réseaux sociaux dégradent les débats en crises, et les crises en catastrophes, menaçant le bien être social. Aussi l'aphorisme de Joubert — "Liberté de la presse: comme on livre ses armes à un furieux qui se tuera si on les lui donne et qui vous tuera si on ne les lui donne pas"— ne peut-il s'appliquer aux réseaux sociaux qui ne font pas que se tuer eux-mêmes, et qu'il faut donc encadrer au plus vite.


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