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Le gouvernement des Etats-Unis vient de lancer un ultimatum à tous les ministères et les agences fédérales du pays. Les institutions devront, dans quatre-vingt-dix jours, commencer à désinstaller les logiciels de l’éditeur russe de sécurité Kaspersky.
Le département de la sécurité intérieure (DHS) a ordonné aux agences et ministères du pays de se passer de ces logiciels, antivirus notamment, de peur que ces derniers ne permettent à Moscou de les espionner. Pour fonctionner, les solutions de sécurité comme celles de Kaspersky, un des leaders mondiaux du secteur, nécessitent un accès profond aux systèmes informatiques qu’ils protègent.
En particulier, les autorités américaines s’inquiètent « des liens entre certains cadres de Kaspersky et le renseignement russe » ainsi que l’obligation légale faite aux entreprises russes de collaborer étroitement avec les agences de renseignement du pays.
« Le risque que le gouvernement russe, de son propre chef ou avec l’aide de Kaspersky, puisse profiter de l’accès fourni par l’entreprise pour compromettre les systèmes informatiques fédéraux est une question de sécurité nationale » écrit le DHS dans un communiqué. Ce dernier se dit aussi ouvert à toute contestation de la part de l’entreprise, qu’elle invite à fournir « une réponse ainsi que toutes preuves ou données appropriées » au sujet de ces accusations.
« Aucune preuve crédible »
Dans un communiqué, l’entreprise a réfuté tout lien « inapproprié » avec le gouvernement, expliquant, selon elle, « pourquoi aucune preuve crédible prouvant ces accusations n’a jamais été avancée » :
« Kaspersky n’a jamais aidé et n’aidera jamais quelque gouvernement que ce soit en matière d’espionnage ou d’offensive informatique, et il est troublant qu’une entreprise soit présumée coupable en raison de problématiques géopolitiques. »
L’entreprise fait référence aux fortes tensions entre Moscou et Washington depuis que les Etats-Unis ont accusé la Russie de s’être immiscée dans l’élection présidentielle de 2016, notamment par le biais de piratages informatiques. L’ambassade de Russie à Washington a d’ailleurs réagi et qualifié de « regrettable » la décision du gouvernement américain, estimant qu’elle rendait plus précaire encore « les perspectives de restauration des relations bilatérales » entre les deux pays.
La décision du DHS est politique, explique Julien Nocetti, chercheur spécialiste d’Internet et de la Russie à l’Institut français des relations internationales : « Kaspersky est une entreprise emblématique, un des rares acteurs économiques russes à être véritablement mondialisé et dont le rayon d’action est global. C’est assez symbolique. »
Il faut rapprocher cette décision de celle prise tout récemment par les autorités de considérer la chaîne RT comme un « agent de l’étranger », explique également le chercheur. « Les Etats-Unis visent le volet influence et le volet sécurité informatique. C’est significatif de la volonté de taper là où ça fait mal » poursuit M. Nocetti.
Les soupçons de proximité entre les services russes et Kaspersky remontent à 2012 mais se sont intensifiés ces derniers mois. En juillet, les autorités américaines avaient déjà retiré Kaspersky de deux listes de fournisseurs agréés de logiciels de sécurité. Peu avant, la commission des forces armées du Sénat avait amendé le projet de loi de finances du ministère de la défense afin d’empêcher ces derniers de recourir à des logiciels fabriqués par l’entreprise russe.
Selon plusieurs médias, des agents du FBI ont même interrogé, avant l’été, une dizaine de salariés de Kaspersky aux Etats-Unis dans le cadre d’une enquête de contre-espionnage. Dans une interview au cours de l’été, le PDG de l’entreprise, Eugene Kaspersky, a même proposé de fournir le code source de ses logiciels au gouvernement américain, afin que ce dernier puisse s’assurer de son fonctionnement loyal.
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