Science & env.
« Le "mukula", précieux bois rouge, est décimé dans la province du Haut-Katanga.» C’est un véritable SOS que vient de lancer Mgr Fulgence Muteba, évêque de Kilwa-Kasenga dans la Province du Haut-Katanga. Dans un communiqué daté du 4 mars 2016, le prélat catholique dénonce l’abattage massif du bois rouge « Mukula ».
« Alors que la RDC a promis à la COP 21 une contribution ambitieuse dans la lutte contre le changement climatique, écrit-il, plusieurs sites dans les territoires de Kasenga et de Pweto, en province du Haut-Katanga, font l’objet de coupe à grande échelle du bois rouge, appelé localement « Mukula ».
A en croire l’évêque de Kilwa-Kasenga, « ce pillage est l’œuvre des Chinois, officiellement affectés aux travaux de construction des infrastructures routières, mais agissant sous la protection bienveillante de proches de certains hauts dignitaires de l’Etat congolais ». « Avant de gagner le marché chinois, où il est vendu à prix d’or, il est soigneusement entreposé dans un lieu bien connu à Lubumbashi, puis est acheminé frauduleusement en containers jusqu’en Tanzanie, via la République zambienne », poursuit-il avant de lancer « un vibrant appel aux autorités publiques, à la population des territoires de Kasenga et de Pweto, ainsi qu’aux personnes de bonne volonté afin que des mesures efficaces soient prises pour arrêter la spoliation de ce patrimoine, protéger ce bois précieux et sauvegarder l’écosystème en vue du bien commun et, particulièrement, de l’équilibre climatique ».
Ce trafic illégal est répréhensible à bien des égards puisqu'il se perpètre « sans licence d’exploitation industrielle ou artisanale légale» – licences qui jusqu’à présent font toujours l'objet de moratoire depuis 2002 – et « qu’aucun effort de reboisement n’est entrepris ». A cela s'ajoute que ni l'Etat, ni les autochtones ne perçoivent une compensation de cette exploitation : « La population de ces deux territoires assiste, impuissante, à l’exploitation de cette précieuse ressource pouvant encore freiner l’avancée du désert de Kalahari. Elle n’y gagne rien. Le trésor public non plus.», déclare le prélat.
Ci-après le texte intégral du communiqué de Mgr Fulgence Muteba Mugalu, l’évêque de Kilwa-Kasenga :
DIOCESE DE KILWA-KASENGA
Evêché
B.P. 74 Kilwa (via Lubumbashi)
République Démocratique du Congo
Communiqué de presse
Le « mukula », précieux bois rouge, est décimé dans la province du Haut-Katanga. Il y a plus de deux ans que les faits avaient été dénoncés dans la partie sud-est de la RDC, où l’on parle de la forêt de Miombo plutôt que de la forêt tropicale humide de la zone équatoriale. Une intervention remarquable du Gouvernement provincial du Katanga avait alors freiné cette entreprise funeste qui dévaste plusieurs hectares de forêt par jour.
Alors que la RDC a promis à la COP 21 une contribution ambitieuse dans la lutte contre le changement climatique, plusieurs sites dans les territoires de Kasenga et de Pweto, en province du Haut-Katanga, font l’objet de coupe à grande échelle du bois rouge, appelé localement « mukula ». De Sapwe (150 km de Lubumbashi), axe routier Minga-Kasomeno, à Katendeji (378 km de Lubumbashi), axe routier Kilwa-Dikulushi, en passant par Bowa(180 km de Lubumbashi), axe routier Kasomeno-Lupembe et Chez Aaron(180 km de Lubumbashi), axe routier Kasomeno-Kasenga, plusieurs arbres de cette espèce sont coupés anarchiquement. On peut voir entassés des milliers de grumes de diamètres divers. Le spectacle est le même près du village Muntufita, groupement de Kizabi, en territoire de Pweto.
Ce pillage est l’œuvre des chinois, officiellement affectés aux travaux de construction des infrastructures routières, mais agissant sous la protection bienveillante de proches de certains hauts dignitaires de l’Etat congolais. Pour jeter de la poudre aux yeux de la population locale, ces chinois emploient quelques jeunes villageois désœuvrés et agissent en toute impunité. Le transport du « butin » se fait nuitamment en camions (pas moins de cinq par jour). Avant de gagner le marché chinois, où il est vendu à prix d’or, il est soigneusement entreposé dans un lieu bien connu à Lubumbashi, puis est acheminé frauduleusement en containers jusqu’en Tanzanie, via la République zambienne.
De toute évidence, cette coupe n’est couverte d’aucun titre légal d’exploitation industrielle ou artisanale. Notons par ailleurs qu’aucun effort de reboisement n’est entrepris. On se croirait dans une jungle. La population de ces deux territoires assiste, impuissante, à l’exploitation de cette précieuse ressource pouvant encore freiner l’avancée du désert de Kalahari. Elle n’y gagne rien. Le trésor public non plus.
Dans la perspective de l’Encyclique Laudato si, du Pape François, je lance un vibrant appel aux autorités publiques, à la population des territoires de Kasenga et de Pweto, ainsi qu’aux personnes de bonne volonté afin que des mesures efficaces soient prises pour arrêter la spoliation de ce patrimoine, protéger ce bois précieux et sauvegarder l’écosystème en vue du bien commun et, particulièrement, de l’équilibre climatique.
Fait à Kinshasa, le 04 Mars 2016
Mgr
Evêque de Kilwa-Kasenga
Président de la Commission provinciale Justice et Paix
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