Après avoir quitté la RD Congo à l’âge de 12 ans, Andy Mulumba n’a cessé de gravir les échelons au point de s’imposer dans l’une des meilleures équipes de football américain aux Etats-Unis. Défenseur des Packers de Green Bay, Mulumba a traversé un parcours sinueux avant de réaliser son rêve dans la prestigieuse NFL.
Quelques minutes après une séance d’entraînement dans le vaste complexe des Packers de Green Bay, dans le Wisconsin américain, Andy Mulumba éclate de rire. Alors qu’on lui parle de football et d’Afrique, le natif de Luputa en RDC tient à apporter une précision. « Pour moi, le football c’était Ronaldo et Ronaldinho. Le football américain, je ne savais pas ce que c’était », se marre Andy Mulumba, davantage spécialiste, dès l’enfance, de ce sport que l’on nomme « soccer » aux Etats-Unis. « En Afrique, je ne jouais qu’au foot et un peu au basket. Je n’avais jamais vu ça (le foot US) à la télé et même en arrivant en Amérique, je ne comprenais rien. Vraiment, ce sport n’avait aucun intérêt à mes yeux », explique l’actuel n°55 des Packers, qui a quitté la RDC à 12 ans pour s’installer, avec ses parents et ses cinq frères et sœurs, à Montréal.
Les études avant tout
L’avenir d’Andy Mulumba paraît alors très éloigné des longs terrains de football américain. Au Québec, le jeune Congolais n’a qu’une obsession : « les études ». « Mon but, c’était d’avoir beaucoup de diplômes, raconte ce titulaire d’un diplôme universitaire en gestion de commerce. J’ai pris l’école au sérieux. C’est pour cela que mes parents nous ont emmenés en Amérique du Nord. Je voulais travailler soit dans les finances ou dans l’aide humanitaire ».
Une envie confirmée par l’un de ses premiers coachs à Montréal. « Andy était un gamin sérieux qui n’avait qu’un but : aller à l’université, garantit Steve Alexandre, désormais conseiller pédagogique du Cégep du Vieux Montréal. Il a toujours pris soin de faire ses devoirs, de réussir ses examens. Et ça a fonctionné puisqu’il a toujours fait partie des meilleurs étudiants lors de chacune de ses années, chez nous ou aux Etats-Unis. C’est un formidable exemple pour les jeunes ».
L’éclosion avant la blessure
Doué à la fois sur les bancs de l’école et crampons aux pieds, Mulumba va rapidement grimper les échelons d’un sport débuté par hasard, à 13 ans, aux contacts de ses amis montréalais. Huit ans plus tard, étudiant à Eastern Michigan, il se retrouve face à un choix cornélien. « A 21 ans, j’ai vécu ma première grosse saison. Mes coéquipiers et entraîneurs me poussaient à rejoindre les professionnels. Moi, j’étais obsédé par mon diplôme. Je ne m’imaginais pas rejoindre la NFL (le meilleur championnat de football américain au monde, Ndlr). Au mieux, la Ligue Canadienne. J’étais réaliste ».
Les quelques mois suivant lui donnent, en partie, raison. Non-recruté à la fin de ses études, Andy Mulumba aurait pu se tourner vers un championnat mineur. Mais invité au printemps 2013 au premier camp d’entraînement de Green Bay, la plus titrée des formations américaines (13 titres), il saisit sa chance. Quasiment à la surprise générale. « Il y a eu une succession de blessés, se souvient-il. Je ne m’attendais vraiment pas à être conservé, mais j’ai appris le livre de jeu (le guide des schémas tactiques de chaque équipe, Ndlr), je me suis battu et le travail a payé. C’était une belle opportunité à saisir ».
Au poste de linebaker « défenseur, c’est plus simple, précise-t-il. Mon rôle et d’arrêter le porteur du ballon », Andy Mulumba étonne. Dès sa première saison, le Congolais enchaîne 14 rencontres et les honneurs. La gloire avant le cauchemar.
Attendu comme l’un des joueurs majeurs de l’ambitieuse formation des Packers l’année suivante, Mulumba est victime d’une déchirure des ligaments croisés du genou droit dès son deuxième match. « Le pire moment de ma carrière, avoue-t-il. Je vivais une période géniale. J’apprenais le business de ce sport, ses contraintes, j’avais acquis de l’expérience. Mentalement, physiquement et émotionnellement, cette blessure fut difficile. Mais si tu travailles, si tu ne lâches rien, revenir reste possible ».
« J’aimerais développer ce sport en Afrique »
De retour depuis quelques semaines sur les terrains, Andy Mulumba peine encore à retrouver son niveau d’antan. Moins performant qu’en 2013, le Congolais s’accroche et attend son heure. « Mon tour viendra, j’en suis sûr. A moi de rester en bonne santé, clame-t-il. D’autres joueurs ont déjà vécu de telles blessures et ont réussi leur pari. J’y crois. Je veux rejouer avec Green Bay et gagner le SuperBowl (la très médiatisée finale de la NFL, Ndlr) ! »
Avant de retrouver la RDC, d’y présenter ce mythique trophée et de promouvoir le football américain en Afrique ? « J’y pense, j’aimerais aider son développement sur mon continent. On m’a déjà proposé plusieurs initiatives, mais en termes de logistique, c’est compliqué. Chez nous, il n’y a pas de terrains, c’est dommage, regrette Mulumba. Pourtant, je suis certain que la NFL aurait tout à y gagner, comme la NBA (ligue de basket-ball, Ndlr) l’a fait, à se rapprocher de l’Afrique. Il y a certainement un grand potentiel de joueurs ».