Politique
Le refus de Kinshasa d’exécuter ce mandat avait sérieusement assombri les relations entre l’Etat congolais et la CPI, car perçu comme une prime d’encouragement à l’impunité des dirigeants africains commanditaires des massacres de leurs peuples. On croit savoir que les deux parties ont pu vider le quiproquo au terme du tête-à-tête d’hier mercredi 12 mars 2014 entre le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération internationale et de la Francophonie, Raymond Tshibanda, et la procureure de la CPI, Fatou Bensouda à Kinshasa. A en croire cette dernière, le gouvernement congolais a reconnu son erreur et trouvé comme explication que le cas Omar El Béchir était fort complexe. Les deux parties se sont engagées à renforcer leur coopération et à faire en sorte que cela ne se répète pas à l’avenir. Dont acte.
De nombreux dossiers pendants
Selon la procureure de la CPI, la République démocratique du Congo représente un large champ à défricher en termes de crimes de guerre et crimes contre l’humanité dont les auteurs et commanditaires restent encore impunis. Aussi, a-t-elle martelé qu’un grand travail d’investigation et de collecte des données reste encore à faire. La Cour pénale internationale, a-t-elle laissé entendre, va prendre tout son temps pour enquêter, sans brûler les étapes.
Les observateurs pensent que cela sous-entend le lancement futur d’un tas de mandats d’arrêt, au fur et à mesure que seraient réunies le maximum de preuves sur les commanditaires et auteurs des crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide en République démocratique du Congo.
Après Lubanga, Katanga, Ngudjolo, Bemba, Ntaganda, Babala, Me Kilolo… à qui le prochain tour ?
La République démocratique du Congo tient, à ce jour, le flambeau de l’Etat ayant fourni le plus important contingent de prévenus à la Cour pénale internationale. Thomas Lubanga (condamné à 14 ans), Germain Katanga (en voie d’être condamné), Matthieu Ngudjolo (acquitté mais bloqué par l’appel de l’accusation), Jean-Pierre Bemba (en jugement), Bosco Ntaganda (en procédures préliminaires), Fidèle Babala et Me Kilolo (en détention) constituent l’échantillon qui donne des sueurs froides à tous ceux qui se savent liés, de près ou de loin, aux crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis en RDC ou Centrafrique (juillet 2002 (date de la création de la CPI) à nos jours.
Autrement dit, si Fatou Bensouda décide de passer à la vitesse supérieure, de nombreux compatriotes présents dans les institutions de la République, les entreprises publiques, la diplomatie, l’armée, la police, les services de renseignements, le commerce… ayant un passé de « seigneur de guerre » au sein de l’ex-gouvernement de Kinshasa ou des mouvements rebelles pourraient voir leur feuilleton de jouissance brutalement arrêté, à l’image des compatriotes qui se morfondent au quartier pénitentiaire de la CPI. Peut-être que dans les mois et années à venir, la CPI pourrait ouvrir les procès des Congolais et étrangers impliqués dans les massacres de l’Est, du Nord, du Centre, de l’Ouest et du Sud du pays.
Ne pourrait-on pas mettre sur pied un Tribunal pénal international sur la RDC, de manière à remonter aux crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide commis en territoire congolais avant juillet 2002 ? Dans ce pays aux feuilletons de tueries planifiées et aux épurations ethniques à répétition, ce serait un signal fort contre l’impunité de tous ceux qui croient ne plus jamais pouvoir être rattrapés par leur passé.
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