Riposte contre l'Iran : Israël maintient le suspense

L'armée israélienne a promis de riposter aux attaques de missiles et de drones iraniens. Le gouvernement de Benyamin Netanyahou, soumis à des pressions internationales, maintient le flou sur ses intentions.

« C'est au tour des Iraniens d'être sur les nerfs, comme nous l'avons été » avant l'attaque de 350 missiles et de drones iraniens ce week-end contre Israël, a affirmé lundi soir Benyamin Netanyahou, lors d'une réunion interne du Likoud, son parti. Autrement dit, le gouvernement israélien refuse pour le moment de lever le voile sur ses intentions.

Seule certitude : le chef d'état-major, le général Herzi Halevi a, pour la première fois, annoncé la couleur. « Israël va riposter », a-t-il prévenu lors d'une visite dans la base aérienne de Nevatim, dans le sud du pays, seul objectif ayant subi des dégâts limités. Pour faire passer son message, le général Halevi s'est fait filmer avec un F-35, un avion disposant du dernier cri de la technologie américaine, bien en évidence derrière lui. Une manière de dire aux Iraniens qu'Israël dispose des moyens de frapper durement l'Iran.

Installations nucléaires

Mais les Israéliens, tout comme les politiciens, sont divisés. Selon un sondage, 38 % estiment qu'il vaut mieux attendre avant de frapper l'Iran, tandis que 29 % sont favorables à des représailles immédiates et que 25 % se déclarent opposés à toute réplique. Sur le front international, les Etats-Unis, la France, la Grande-Bretagne maintiennent la pression sur Benyamin Netanyahou pour qu'il ne donne pas son feu vert à des attaques massives sur le territoire iranien, notamment les installations nucléaires iraniennes.

Ces pressions ont atteint un tel niveau, que, selon la télévision publique, Benyamin Netanyahou a refusé depuis dimanche de s'entretenir avec des dirigeants étrangers, en particulier le Premier ministre britannique Rishi Sunak. Le chef du gouvernement semble malgré tout avoir entendu le message. « Israël répliquera, mais de façon judicieuse et pas de façon viscérale », a-t-il assuré.

Ecran de fumée

Difficile de savoir s'il s'agit d'un simple écran de fumée. Les partisans de la manière forte au sein de l'armée et des partis d'extrême droite membres de la majorité avancent l'argument selon lequel Israël doit à tout prix frapper très fort, ne serait-ce que pour ne pas entamer son pouvoir de dissuasion.

Les partisans d'une certaine modération estiment que la coalition anti-iranienne réunissant les Américains, les Européens, les pays sunnites de la région, tels la Jordanie, l'Arabie saoudite, les Emirats, pourrait constituer un outil efficace pour bloquer le programme nucléaire iranien. Un programme que Benyamin Netanyahou ne cesse de présenter depuis des années comme le plus grand danger pour l'existence de l'Etat d'Israël.

Cyberattaques

Comme le souligne l'ancien numéro deux du Mossad Ram Ben Barak, Israël est déjà engagé dans des conflits sur plusieurs fronts. « Nous menons une guerre à Gaza, tout en faisant face à un énorme défi au Liban avec le Hezbollah, nos dirigeants politiques seraient bien avisés dans ces conditions de choisir une priorité, car nous ne pouvons pas vaincre sur tous les théâtres d'opérations », prévient ce député centriste d'opposition.

Parmi les scénarios évoqués par les commentateurs militaires figurent des raids aériens en Syrie contre des livraisons d'armes iraniennes au Hezbollah ou contre des bases de rebelles yéménites houthis, des cyberattaques pour paralyser en Iran les transports, le trafic aérien, les centrales électriques, des entreprises liées aux Gardiens de la Révolution, voire des éliminations ciblées de dirigeants de cette organisation, véritable épine dorsale du régime iranien, impliqués dans les attaques de missiles et de drones contre Israël.

Très chers systèmes de défense

En attendant de trancher, l'armée israélienne fait ses comptes. Le recours aux quatre systèmes de défense aérienne, qui ont enregistré 99 % de succès, selon le porte-parole militaire, a coûté très cher. Selon Reem Aminoach, un général de réserve ancien conseiller financier du ministère de la Défense, la note pour parvenir à ce résultat flatteur s'élève « à plus d'un milliard de dollars ».

Un exemple : chaque tir des batteries de type Arrow 2 ou 3 contre des missiles balistiques ou de croisière revient entre 2,5 et 3,5 millions de dollars. Pour le système David Sting (la fronde de David), la facture s'élève à un million de dollars l'unité.

« Ces systèmes reviennent cher, mais nous nous sommes engagés à protéger notre population ainsi que les installations stratégiques, et à tout faire pour éviter une paralysie de notre économie, autant de considérations dix fois plus importantes que le prix des systèmes de défense », explique Moshe Patel, en charge des programmes de missiles après du ministère de la Défense.