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Infos congo - Actualités Congo - Premier-BET - 02 mai 2024
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Chroniques & Analyses

Pourquoi autant d’embouteillages à Kinshasa ? (Analyse d'Oasis KodilaTedika*)

2022-11-01
01.11.2022
Société
2022-11-01
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Embouteillage du Rond-point Ngaba à Kinshasa après la pluie de ce jeudi 17 Decembre 2020

Kinshasa, jadis « Kinshasa la Belle », se laisse identifier aujourd’hui par plusieurs qualificatifs. Et le dernier en date est « Kinshasa, ville d’embouteillages ». Pourquoi y aurait-il présentement plus de bouchons dans la capitale de la RDC ?

De prime abord, les embouteillages peuvent être synonymes de plus de richesse, permettant à un grand nombre d’accéder à des moyens de déplacement privé. Regardons de près. En considérant les différents cadrages macroéconomiques entre 2006-2018, la croissance de l’économie (Produit Intérieur Brut – PIB) de la ville a été de près de 5,3% et celle de la richesse des kinois, mesuré par le PIB per capita, n’a été que de 1%, selon nos calculs. En absolu, le revenu par habitant (en dollar Parité Pouvoir d’Achat) est de 1805 USD en 2016 (selon les derniers chiffres disponibles).

Pourtant, le graphique, construit par moi-même en partant des données du Ministère des Finances et l’Office des routes, ci-après suggère une augmentation de la demande de voitures à Kinshasa. On a quitté de 14748 véhicules immatriculés en 2012 à 21971 en 2017, soit une augmentation de l'ordre de 48,98% (échelle de droite). Une autre manière de regarder le problème : en 2012, Kinshasa représentait 39,4% de tous les véhicules immatriculés du pays.

En 2017, cette proportion est passée à 53,04%, soit une augmentation de 13,63 en point de pourcentage (échelle de gauche). En des termes différents, soit les ressources dont disposent les kinois sont assez importants pour s’acheter des voitures – un indice sérieux de corruption étant donné l’évolution du PIB per capita dans une certaine mesure –, soit il existe un marché de voitures permettant aux kinois de se procurer des voitures à moindre coût étant donné le niveau des revenus (Dubaï, par exemple).

Par ailleurs, la richesse n’est pas la seule explication de cette augmentation de l’achat des voitures. La qualité de l’offre de transport public et privé (notamment insécurité avec des kidnappings) étant insuffisante, la population urbaine préfère disposer de sa propre voiture privée. Ainsi, la voiture n’est plus seulement un bien pour se déplacer. Elle devient également un moyen de se prémunir.

1. Evolution du infrastructurel et des immatriculations dans la ville de Kinshasa 

Paul Samuelson, prix Nobel d’économie, disait souvent que « l’économiste est un âne qui répond toujours à toutes les questions par les mêmes mots, offre et demande » ! Considérons donc la boîte à outil classique des économistes, c’est-à-dire la loi de l’offre et de la demande, pour trouver d’autres explications. Si en 1960, Kinshasa était habitée par à peine 1 million de citoyens, aujourd’hui il y a eu une croissance exponentielle, car la mégalopole est habitée par près de 15 millions de personnes. Evidemment, la taille de la population, captée par la densité démographique, n’est pas en soi un problème d’autant plus qu’Hong-Kong est quatre fois plus densement peuplé que Kinshasa. Mais il ne connaît pas le type d'embouteillages que l’on rencontre à Kinshasa. Il en vaut de même pour les Maldives, Malte, Vatican qui ont quasiment la même densité que Kinshasa mais sans connaître le même problème.

Toutefois, la démographie kinoise n’est pas sans conséquence pour une autre raison. La taille de la population exerce une pression sur la demande en transports qui ne cesse d’augmenter fortement. Mais l’offre n’a pas suivi. Depuis, Kinshasa n’a véritablement pas agrandi ses artères ni n’en a créé d’autres. Toujours du côté de l’offre d’infrastructures, les données de l’étude de Kumar et Barrett (2008), pour le compte de la Banque Mondiale, révèlent que seul un tiers des routes sont revêtues dans les villes africaines, allant d’à peine 10% à Kinshasa et Kigali (Rwanda) à plus de 70% à Kampala (Ouganda).

Parallèlement, le parc d’infrastructures de la ville de Kinshasa ne cesse de se dégrader, au point que plus de 50% des actifs infrastructurels ont besoin d’être réhabilités. L’opération « Kinshasa zéro trou » ni les sauts-de-mouton ne semblent faire le poids. D’ailleurs, selon le graphique ci-dessus, l’offre d'infrastructures baisse sensiblement : en 2012, il n'y avait que 46,32 km de routes entretenus contre 25,34 en 2017, 89,41 km de routes réhabilitées en 2012 contre 60,75 en 2017. En conséquence, 76,9% de congolais ne sont pas satisfaits des services publics de routes et 73,1% ne sont pas satisfaits des services publics de transports, selon l’enquête QUIBB. Ces problèmes illustrent la faiblesse des fondamentaux, faiblesse qui crée naturellement un déséquilibre entre l’offre et la demande, débouchant sur… des bouchons interminables et la congestion régulière de la cité.

D’autre part, si les fondamentaux expliquent ces embouteillages, les causes de cette situation résident aussi ailleurs. En effet, la corruption constitue une partie de l’explication des embouteillages à Kinshasa. Certaines artères à problème (avec des nids de poule) de la ville de Kinshasa le sont du fait du comportement de rente dans le secteur. Les dépenses d’investissement dans les infrastructures n’ont pas été allouées de manière efficiente. Le détournement des ressources a conduit à avoir des macadams médiocres. Les épisodes récents des arrestations avec le projet 100 jours et le reste sont assez éloquents.

On retrouve également la corruption (discrète) chez les agents censés réglementer le secteur transport. Il est un secret de polichinelle que la distribution des permis de conduire en RDC ne respecte pas les règles établies, contournées par les agents : on distribue les permis à tout le monde. Une telle distribution autorise donc des incompétents ou des chauffards à circuler dans la ville, rendant ainsi la circulation problématique du fait de leur non-maîtrise du volant (non-respect du code la route, etc.). En sus, personne n’ignore que le permis de conduire n’est plus valide depuis ni disponible, malgré les promesses du Ministre des Transports qui parlait de le rendre disponible avant le 30 Mai 2022. Conséquence : tout le monde use de sa voiture à souhait, ne considérant aucune règle de conduite (code de la route). Peut-être parce que la majorité ne la connaît même pas.

La corruption et les tracasseries à la base d’un déséquilibre sur le marché des transports en commun

La corruption est aussi ailleurs, sous les képis. Batamba Balembu rapporte que la pratique corruptive est notamment à la base d’un déséquilibre (embouteillage, contournement des itinéraires, etc.) sur le marché des transports en commun. Concrètement, 94% des enquêtés de Batamba Balembu sont de cet avis. 47% des conducteurs recourent au contournement des itinéraires infestés par les policiers racketeurs, 48% sectionnent carrément les trajets ordinaires en sous-trajets afin de ne pas réduire les profits (du fait du racket) et 5% majorent les tarifs des transports. Conséquence : l’accès au service collectif est compliqué.

Enfin, un dernier élément : la structure monocentrique de l’espace urbain. Les différents facteurs considérés jusque-là étant, cette structure complique la fluidité dans la ville car, la circulation est à sens unique (convergence matinale vers la commune de la Gombe). Cette concentration appelle naturellement à long-terme à un dégorgement de la ville, par son extension intelligente. Sinon, cette contrainte exercera toujours une pression aussi bien sur les infrastructures (surtout) que sur les agents commis au contrôle de la circulation, tant que la technologie notamment ne viendra pas aider.

En somme, s’il est évident que l’offre, expliquée par les fondamentaux, ne changera pas aussi rapidement étant donné l’insuffisance des moyens ou des financements, il est aussi vrai que les embouteillages peuvent être réduits si l’on réfléchit à comment diminuer les affres de la corruption.

*Oasis KodilaTedika est un économiste et auteur récemment du livre Financement du développement en RDC : diagnostic, opportunités et perspectives.

 


congo-press.com (MCP) / via mediacongo.net
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